Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

comme un violon, et qui vend en personne sa rhétorique usée. Ainsi que le violon, il recommence sans cesse la même ritournelle qu’il débite depuis dix ans ; et il ne sentira pas même l’ennui qu’il distille.

Vive donc la danse, mes chers Parisiens ! et de préférence à la triste et monotone littérature de nos redondantes académies, de préférence surtout à tous ces lieux communs d’aristocratie hébétée et de royalisme extravagant. Que nos Lycées, au lieu de nous distribuer des phrases si rebattues, ouvrent leurs vastes salles à la danse. Pesants duri-crânes, dont le style même ne danse jamais, taisez-vous : vous ne valez pas le violon qui nous met en joie, car vous attristez une brillante et nombreuse assemblée : faites place au tambourin ; et pour le mieux prouver, voici ce que le grave Montesquieu a écrit sur la danse : « La danse nous plaît par la légèreté, par une certaine grâce, par la beauté et la variété des attitudes ; par sa liaison avec la musique ; mais surtout elle plaît par une disposition de notre cerveau, qui est telle qu’elle ramène en secret l’idée de tous les mouvements à de certains mouvements, la plupart des attitudes à de certaines attitudes »[1].


BALS À LA VICTIME



Vingt-trois théâtres, dix-huit cents bals ouverts tous les jours ; voilà ce qui compose les amusements du soir.

  1. Une partie de ce chapitre a été insérée au Moniteur du 28 pluviôse an V. « On y reconnaîtra, dit le journal officiel, toute l’originalité et la justesse d’observation qui distingue Mercier, quand il veut se borner au seul genre qui lui convienne. » La suite de la note nous apprend que Mercier n’avait pas encore fixé son titre de Nouveau Paris et qu’il conservait pour ce projet d’ouvrage celui de Tableau de Paris.
    (Note de l’édition Poulet-Malassis.)