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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome II, 1782.djvu/138

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Le goût académique se joint à ce fléau, pour proscrire tout ce qui porte l’empreinte de l’invention, du génie, de l’éloquence ; & l’on veut nous assujettir à cette servitude de mots, couleur dominante d’une école seche, aride ; elle aiguise des phrases, elle ne sait plus reconnoître la libre audace d’un écrivain, maître de sa maniere, & produisant sa pensée sans détour & sans grimaces. Il faut que notre talent paroisse ce qu’il est ; & s’il se modele sur autrui, il perd ce qu’il a d’original, & tombe, non dans la bonté, mais dans la sottise de celui qu’il veut imiter. Voyez les copistes de la Fontaine, la Bruyere, Fontenelle, Voltaire & même Dorat. Ô Retif de la Bretone ! tu ne seras apprécié que fort tard ; mais je m’honore de t’offrir ici mon suffrage, dussé-je être le seul à sentir ton mérite.