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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome II, 1782.djvu/23

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environs du Pont-Neuf & du Louvre, pour y dépenser quelques sols arrachés à la luxure des savoyards, des manœuvres & des filoux.

Il n’est pas rare de les voir autour d’un broc rempli d’un pot d’eau-de-vie, pêle-mêle avec des soldats, des porte-faix & des gadouards, former un concert obscene & discordant, qui frappe sans relâche la voûte enfumée de cet odieux tripot.

Les esprits échauffés n’y sont pas toujours d’accord. Des rixes s’élevent, & la paix ne peut guere se rétablir qu’après un combat. Alors le vigoureux cabaretier arrache de la table les champions obstinés, & les pousse dans une cour attenante, où ils vuident leur querelle par une grêle de coups de poings ; après quoi le vainqueur & le vaincu, reprenant leurs places, oublient le verre à la main & les injures & les coups.

Ce n’est pas sans raison que l’hôte introduit les athletes dans cette arene clandestine. S’il les mettoit à la rue, il courroit risque de perdre le prix de l’écot, parce qu’ils pour-