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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/205

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toujours acharnés à dépouiller les nécessiteux. Les agioteurs masqués, qui cachoient leurs opérations vexatoires, se sont vu forcés dans leurs invisibles retranchemens. Il faut qu’ils renoncent à un commerce illégitime, dont la trop puissante amorce étouffoit toute spéculation généreuse, toute entreprise magnanime ; car on ne savoit plus que tourmenter l’argent, pour achever la ruine de celui qui en étoit affamé.

Rien ne prouve mieux le besoin que la capitale avoit de ce lombard, que l’affluence intarissable des demandeurs. On raconte des choses si singulieres, si incroyables, que je n’ose les exposer ici avant d’avoir pris des informations plus particulieres, qui m’autorisent à les garantir. On parle de quarante tonnes remplies de montres d’or, pour exprimer sans doute la quantité prodigieuse qu’on y en a porté. Ce que je sais, c’est que j’ai vu sur les lieux soixante à quatre-vingts personnes qui, attendant leur tour, venoient faire chacune un emprunt qui n’excédoit pas six livres.