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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/206

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L’un portoit ses chemises ; celui-ci un meuble ; celui-là un débris d’armoire ; l’autre ses boucles de souliers, un vieux tableau, un mauvais habit, &c. On dit que cette foule se renouvelle presque tous les jours, & cela donne une idée non équivoque de la disette extrême où sont plongés le plus grand nombre des habitans.

Que donneroit-on à un auteur pauvre & ayant du génie, qui porteroit un manuscrit, par exemple, l’Esprit des loix, ou l’Histoire du commerce des deux Indes, ou l’Émile, non imprimés ? Qu’en diroit l’huissier-priseur ? à quel taux mettroit-il l’ouvrage ?

L’opulence emprunte de même que la pauvreté. Telle femme sort d’un équipage, enveloppée dans sa capote, & y dépose pour vingt-cinq mille francs de diamans, pour jouer le soir. Telle autre détache son jupon, & y demande de quoi avoir du pain.

Le mont de piété a fait tomber les diamans, parce que c’est la premiere chose qu’on y a mise en gage, & insensiblement on a vu