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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/228

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Cruelle charité que celle de nos hôpitaux ! Fatal secours, appât trompeur & funeste ! Mort cent fois plus triste & plus affreuse que celle que l’indigent recevroit sous son toit, abandonné à lui-même & à la nature ! La maison de Dieu ! & on ose l’appeller ainsi ! Le mépris de l’humanité semble ajouter aux maux qu’on y souffre. Le médecin, le chirurgien sont payés ; d’accord : les remedes ne coûtent rien ; je le sais : mais on couchera le malade à côté d’un moribond & d’un cadavre ; on lui mettra le spectacle de la mort sous les yeux, lorsque les angoisses de la terreur pénétreront déjà son ame épouvantée… La maison de Dieu ! On le plongera dans un air rempli de miasmes putrides ; on le soumettra à un despotisme qui n’écoutera ni le cri de sa douleur, ni ses représentations, ni ses plaintes ; on ne lui donnera personne pour le consoler, pour l’affermir ; on sera indifférent à l’enlever comme mort ou comme convalescent : la pitié même sera aveugle & meurtriere ; car elle n’aura plus ce qui la