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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/5

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ployer le plus de papier possible, & le vendre ainsi tout barbouillé aux malheureux plaideurs ; de sorte qu’on puisse en former des dossiers épais. Et qu’est-ce qu’un dossier ? C’est la masse bizarre de ces épouvantables procédures. Et un dossier épais, que coûte-t-il bien ? Sept à huit mille francs pour commencer à éclaircir un peu les choses.

Mais toutes ces paperasses servent-elles du moins au juge ? Jamais. Quand il y a un rapporteur, son secretaire fait sur une feuille volante un extrait de ces énormes grosses, & toutes les raisons du procureur restent au fond du sac : ainsi ce déluge d’écritures ne servira pas même dans la cause dont il s’agit, le juge ne verra que l’extrait du secretaire fidele ou infidele ; & voilà ce qu’on appelle l’instruction chez un peuple civilisé, ou soi-disant tel.

Le procureur dans son greffe est environné de ces dossiers érigés en trophées & qui montent jusqu’au plancher, à peu près comme le sauvage de l’Amérique s’environne dans