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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/62

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que perd l’écrivain audacieux, où toute innovation a le dessous, où cette expression de Corneille n’a pu se naturaliser.

Ton bras est invaincu, mais non pas invincible.

Il faut dire hardiment que cette langue n’est pas poétique ; que sa poésie n’est qu’une prose rimée ; qu’elle n’a ni abondance, ni énergie, ni audace ; qu’elle n’en aura jamais, puisqu’il est défendu de l’enrichir, puisque sa marche, loin d’être libre & fiere, est compassée, mesurée, rétrécie, soumise au compas. Ajoutons qu’il faut être insensé pour s’assujettir au lâche caprice d’un peuple attaché à ces sottes habitudes ; consultant les journalistes, assassins périodiques de la poésie, & qui, conformément à leur style rampant, rejettent la force & l’énergie, lorsque le poëte s’en sert pour peindre ses pensées avec les sons qui lui plaisent.

Puisque ce peuple ne veut adopter que ce qu’il a, son triste & indigent Boileau & son sec & dur Rousseau, il faut le laisser dans le soin puérile de calculer des syllabes, au lieu