Aller au contenu

Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/11

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 9 )

trébuche, & tous les valets de rire. Il ne le trouve pas mauvais ; il est dans cette maison sans en connoître les ressorts ; il ne connoît rien aux tracasseries régnantes ; il n’a aucune idée des caracteres. Si l’on parle de chevaux, de chiens, de bals, de spectacles, il est muet ; il faut qu’il entre dans le service militaire pour perdre son air gauche & son maintien niais.

Au bout de six mois qu’il est au régiment, il est déjà tout autre. Après avoir ferraillé deux ou trois fois, il prend un maintien assuré, de sorte que son pere, son oncle, ne le reconnoîtroient pas.

Une femme acheve de le former ; il prend l’esprit du corps, & ce même jeune homme qui ne savoit ni entrer, ni marcher, ni saluer, porte la tête haute, sourit aux femmes, prend le ton décidé, & cette étrange métamorphose a été l’ouvrage de dix-huit mois.