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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/257

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immersion. Quel chaudron ! quelle soupe ! Mais j’apperçois que j’offenserois votre délicatesse si j’allois plus loin. Rassurez-vous, délicats sybarites, je ne vous dirai plus rien. Il importera sans doute à d’autres de savoir comment le peuple qui travaille le plus vit & se nourrit.

Passez ensuite devant la porte d’un hôtel ; on sent de loin une odeur agréable qui anime l’appetit. On se nourriroit presque à la fumée épaisse que la cuisine exhale par les barreaux qui donnent sur la rue. Avancez la tête, trente casseroles sont sur des brasiers ; des cuisiniers en vestes blanches les agitent avec grace ; chaque sauce est interrogée dix fois ; toutes sortes de mets vont couvrir une table où s’asseyeront cinq ou six épicuriens qui toucheront à vingt plats d’une dent dédaigneuse, & qui ne songeront seulement pas s’il existe des hommes à qui le nécessaire manque, à raison du haut prix où les riches qui accaparent tout, ont fait monter toutes les denrées.