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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/301

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né pour l’erreur qu’on lui apprête, qu’il ne s’appercevra pas que chaque ordinaire le remet précisément au même point, & que tous ces faits qu’il prend pour certains, deviennent équivoques quelques jours après, parce qu’on a donné des dimensions étranges à un peu de vérité, & que tout le reste a reçu les couleurs ingénieuses du mensonge.

Ne diroit-on pas à chaque Mercure nouveau, que l’Angleterre est abymée, qu’elle n’a plus ni flottes, ni commerce, ni banque ? On entend dans les cafés des gens qui, la gazette de France en main, au plus léger avantage, affirment que le peuple Anglois est aux abois ; que dans trois mois il n’en sera plus question. C’est un épicier du coin qui spécule sur le sucre & le café, qui fait ces belles prophéties ; il le dira le soir à sa femme qui hait les Anglois, parce qu’ils sont hérétiques.

Cependant on a passé sous silence, pendant six années consécutives, les opérations de ce peuple énergique, valeureux & fier, qui crée & qui sent ses forces, & dont la situa-