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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/316

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une infinité de rebus populaires qui réjouissent le buveur ; il s’interrompt pour rire d’une bouche large au nez de celui qui le désaltere & qui l’amuse : le tout pour un liard.

Anatomistes, dites-le moi, comment son gozier docile peut-il suffire à crier sans interruption, à chanter sa marchandise, avec des roulades, des passages & des tons qui me surprennent véritablement ? Le larynx de ces hommes-là est bien remarquable, & leur glotte de perroquet doit avoir, si je ne me trompe, une configuration toute particuliere. C’est une voix enfin comme il n’y en a pas dans le reste du monde.

Musique, bons mots, réglisse, ils prodiguent tout ; mais aussi faisant certaines pauses, ils disparoissent & vont au cabaret métamorphoser promptement en vin l’eau fade de leurs fontaines ; en cela, ils ressemblent assez aux vendeurs de morale, qui la crient volontiers en tous lieux, mais qui laissent à d’autres le soin de la savourer.