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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/321

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Un badaud prend un personnage de la fable pour un saint du paradis, Typhon pour Gargantua, Carron pour S. Pierre, un satyre pour un démon ; & comme le dit l’auteur du poëme des Fastes, l’arche de Noé pour le coche d’Auxerre. Eh bien ! ce peuple qui n’a aucune connoissance en peinture, va par instinct au tableau le plus frappant, le plus vrai ; il ne le manque pas. C’est qu’il est juge de la vérité, du trait naturel, & tous ces tableaux sont faits pour être jugés en dernier ressort par l’œil du public.

Ce qui fatigue & quelquefois révolte, c’est de trouver là une foule de bustes, de portraits d’hommes sans nom, ou le plus souvent exerçant des emplois antipopulaires. Que nous fait la figure de ces financiers, de ces traitans, de ces premiers ou seconds commis, de ces dolentes marquises, de ces inconnues comtesses, de ces présidentes nulles, qui ont les joues enluminées, car il faut peindre les femmes avec leur rouge ; il faut de plus les faire rire. De sorte que le sallon à l’air d’une