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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/50

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fortune, & place la fille d’une cuisiniere auprès du trône.

Sans obtenir un rang si élevé, la beauté indigente rencontre la fortune. À peine une robe couvroit ses attraits, bientôt pour quelques complaisances un équipage est à ses ordres. Le millionnaire la supplie à genoux d’accepter son or, veut enrichir sa famille ; & son vieux pere, sous ses cheveux blancs, plein de son antique probité, voit l’abondance refluer vers son obscure chaumiere. Il craint d’accepter ; il ne sait s’il commet un crime, mais la voix de la misere plus forte, l’oblige à répandre sur de petits enfans à demi-nus les secours qui lui sont offerts. Il est peut-être plongé dans l’erreur ; mais quand il n’y seroit pas, il regarde ces bienfaits, arrivés d’un pays lointain, comme un présent que le ciel lui accorde dans sa vieillesse. Soixante années de travaux ne lui ont pas apporté ce qu’il obtient dans un jour ; & de peur d’être obligé de s’y refuser, il n’arrête pas sa pensée sur ces dons de l’amour filial. Ainsi l’or extor-