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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/57

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rentre dans sa famille & dans la société. Elle a pu accoucher dans une rue voisine, voyant de sa fenêtre celles de son pere sans que celui-ci s’en doute ; & voilà ce que la province ne sauroit concevoir.

La sage-femme se charge de tout, présente l’enfant au baptême, le met en nourrice, ou aux Enfans-trouvés, selon la fortune du pere ou les craintes de la mere.

Combien ces réduits secrets ont-ils vu de malheureuses & tendres amantes, quelquefois trahies, abandonnées, & mouillant de leurs larmes tardives leur couche solitaire ? Quelle situation affreuse que celle de la jeune beauté qui, pressée entre le remord, le désespoir & la honte, paie avec usure un moment de foiblesse ! Elle ne peut nommer ni son amant ni son fils en les chérissant tous deux ; fugitive de la maison paternelle, elle se trouve isolée dans cette immense ville, & obligée de vendre de petits bijoux pour obtenir le lit où elle déposera le fruit de ses amours.