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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VIII, 1783.djvu/90

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des élus. Qu’est-ce qu’un homme, s’il n’est académicien ?

Le peintre recommandera despotiquement sa maniere, le poëte fera secte pour ses vers, l’orateur prônera exclusivement son goût, chaque membre de l’académie, quoique divisée entr’elle, se réunira contre l’étranger & le regardera comme un profane.

Que fait-là, dans ce café ou dans ce sallon, cet académicien, pilier de l’endroit ? Quel est son emploi ? Il fait l’oracle ; il prend le dédain pour de la hauteur ; il enseigne à la jeunesse à beaucoup respecter les écrivains qui n’écrivent pas ; preuve incontestable, selon lui, de supériorité & de goût. Il gémit ensuite de la décadence de la littérature. Le siecle est indigne de le lire ; il faudroit que les esprits fussent d’abord préparés, pour pouvoir bien goûter son style & ses idées ; aussi, s’enveloppant dans un dédaigneux silence, il paracheve académiquement son rôle de nullité, qu’il ne surmontera point, malgré les deux muscles rengorgeurs de sa tête capable.