Page:Mercure de France - 1896 - Tome 17.djvu/374

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née ; — il est revenu ; — que portait l’arbuste ? Un fruit d’églantier !

Mlle Skære

(choquée). — Voulez-vous expliquer ?

Falk

. — Un fruit utile pour l’usage domestique [1],

— oui, Dieu sait ! Mais, le fruit d’églantier n’était pourtant pas la fiancée de son printemps.

Mme Halm

. — Si M. Lind a voulu une héroïne de bal,

c’est fâcheux ; elle n’est pas à chercher ici.

Falk

. — Oh oui, — je sais que c’est une coquetterie

à la mode, les soins du ménage ; c’est une bouture du grand mensonge qui pousse en haut, comme la vrille de houblon. Je lève respectueusement mon chapeau, madame, devant « l’héroïne de bal » ; elle est enfant de beauté, — et ce modèle tend des filets dorés dans les salons, mais difficilement dans la chambré d’enfants.

Mme Halm

(avec une amertume réprimée). — Monsieur

Falk

, une pareille conduite s’explique aisément.

Un fiancé est perdu pour la société de ses amis ; voilà le fond de toute l’histoire, j’ai bonne expérience sur ce chapitre.

Falk

. — Naturellement ; — sept filles mariées —

Mme Halm

. — Et bien mariées !

Falk

(avec force). — Oui, est-ce certain ?

Guldstad

. — Quoi maintenant ?

Mlle Skære

. — Monsieur Falk !

Lind

. — Est-ce ton intention de souffler la discorde ?

Falk

(avec éclat). — Oui, guerre, querelle, désunion !

Styver

. — Toi qui es célibataire, un profane dans la

partie !

Falk

. — Peu importe ; je déploie enfin le drapeau !

Oui, je veux la guerre, guerre à outrance, guerre contre le mensonge aux fortes racines, contre le mensonge que vous avez cultivé et arrosé, tellement qu’il dresse impudemment la tête et semble la vérité !

Styver

. — Je fais protestation contre tout imprévu,

et me réserve recours — —

Mlle Skære

. — Tais-toi !

Falk

. — Ainsi, c’est la fontaine pure de l’amour, qui

murmure ce que la veuve a perdu, — cet amour qui a aplani l’absence et le regret des paroles envolées aux jours lumineux du bonheur !

Ainsi, c’est le flot victorieux de l’amour qui court le long des années du ménage, — cet amour qui s

  1. On en fait de mauvaises confitures.