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ACTE TROISIÈME

Soir et clair de lune. Dans les arbres brûlent des lumières colorées. Aufond, des tables couvertes de bouteilles de vin, de verres, de gâteaux, etc. De la maison, dont toutes les fenêtres sont éclairées, on entend un bruit assourdi de piano et de chant, pendant la scène suivante. Svanhild est debout près de la véranda. Falk arrive de la droite avec quelques livres et un buvard sous le bras. Le domestique le suit avec une malle et une valise.

Falk

. — C’est bien le reste ?

Le domestique. — Oui, je ne crois pas qu’il manque autre chose qu’un petit frac et le paletot d’été.

Falk

. — Bien ; je le mettrai quand je m’en irai. Pars ;

— tiens voilà le buvard.

Le domestique. — Il y a une serrure, je vois.

Falk

. — Oui, il y a une serrure, Sivert.

Le domestique. — Bien.

Falk

.— Je te prie de le brûler tout de suite.

Le domestique. — Brûler ?

Falk

. — Oui, comme charbon — (souriant) avec

toutes ces traites sur l’or poétique. Les livres, — tu peux les garder pour toi.

Le domestique. — Oh non ; je ne vais pas vous causer de pareils frais ! Mais si Monsieur Falk veut donner ses livres, c’est donc qu’il a fini d’apprendre ?

Falk

. — Tout ce qui s’apprend dans les livres, je l’ai

appris,— et encore plus.

Le domestique. — Plus ? c’est fort.

Falk

. — Oui, dépêche-toi ; les porteurs sont à la

porte ; — tu vas les aider à charger.

(Le domestique s’en va par la gauche.)
Falk

(s’approche de Svanhild, qui vient à sa rencontre).

— Nous avons une heure à nous, Svanhild, sous la lumière de Dieu et les étoiles de cette nuit d’été. Vois-les qui brillent, à travers la voûte du feuillage, comme des fruits sur la branche, ces semences de l’arbre du monde. Maintenant j’ai brisé le dernier lien de servitude, maintenant le fouet m’a touché pour la dernière fois ; comme le fils de Jacob, le bâton à la main, en costume