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mercvre de france—xii-1899

– Eh ? fit-il en se retournant. Il ne veut pas comprendre que mes plantes ont une grande valeur.

– La Mort ! criai-je. La Mort qui vient ! La Mort !

Le laissant digérer cela, s’il le pouvait, je m’élançai à la suite de l’artilleur. Au coin, je me retournai. Le caporal avait planté là le pauvre homme qui restait debout auprès de sa malle, sur le couvercle de laquelle il avait posé ses pots, regardait d’un air hébété du côté des arbres.

Personne à Weybridge ne put nous dire où se trouvait le quartier général : je n’avais encore jamais vu une pareille confusion : des chariots, des voitures partout, formant le plus étonnant mélange de moyens de transport et de chevaux. Les gens honorables de l’endroit, en costume de sports, leurs épouses élégamment mises, se hâtaient de faire leurs paquets, énergiquement aidés par tous les fainéants des environs, tandis que les enfants s’agitaient, absolument ravis, pour la plupart, de cette diversion inattendue à leurs ordinaires distractions dominicales. Au milieu de tout cela, le digne prêtre de la paroisse célébrait fort courageusement un service matinal et le vacarme de sa cloche s’efforçait de surmonter le tapage et le tumulte qui remplissaient le village.

L’artilleur et moi, assis sur les marches de la fontaine, nous fîmes un repas suffisamment réconfortant avec les provisions que nous avions emportées dans nos poches. Des patrouilles de soldats, non plus de hussards ici, mais de grenadiers blancs, invitaient les gens à partir au plus vite ou à se réfugier dans leurs caves sitôt que la canonnade commencerait. En passant sur le pont du chemin de fer, nous vîmes qu’une foule qui augmentait à chaque