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MERCVRE DE FRANCE—II-1900

tâtait en demandant : « Est-ce que je te fais mal, mon petit bonhomme ? » Il me regardait dans la bouche aussi et c’était drôle parce qu’il disait : « Allons, ouvre le bec. » À la fin il y avait tel ou tel remède à prendre, qui faisait battre notre cœur : C’est peut-être le vrai remède. Et quand nous sortions, le médecin me caressait et me donnait de la joie parce que je savais répondre à ses questions : « Qui est-ce qui a succédé à François Ier ? »

Nous remontions chez nous, le jeudi matin. Un enfant et sa mère ont descendu cette rue en ne sachant pas, voici qu’ils la remontent en souriant. Les nouveaux médecins sont pareils aux nouvelles amantes qui nous donnent un nouveau bonheur. Et vous, jeudi matin, avec cette clarté, vous embellissiez la semaine. Jeudi matin, je vous aime, et maintenant vous êtes encore pour moi un matin d’espérance.

Pendant longtemps les remèdes se suivirent. Nous courons chez le pharmacien et je les utilise immédiatement. Il ne faut pas laisser au mal un seul des instants qu’on peut lui soustraire. Les premiers jours j’étais bien naïf. Chaque potion amère fut un divin liquide inventé pour le bonheur humain. Je la bois, je la sens en moi, je gesticule en criant : À présent je suis guéri !

Un peu plus tard j’espérais au lendemain. Celui qui se couche plein de souffrance, la nuit le prend entre ses mains et le caresse et le repose. Demain matin, la fatigue s’en est allée ; le sommeil vous a lavé la tête, et la grosseur de votre joue — vous souvenez-vous ? — eh bien ! elle n’est plus là.

Un peu plus tard encore j’espérai dans la fin de la semaine. Plusieurs jours sont nécessaires pour que ce remède entre dans votre sang. Tout d’abord