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LE POUVOIR RELIGIEUX AU THIBET

mons » et à leurs représentants à qui il laissa une place honorable dans l’Église. Par le mélange qu’il fit de la métaphysique bouddhique et des superstitions thibétaines, il peut être considéré comme le véritable fondateur du lamaïsme, qui diffère si complètement des autres sectes d’origine bouddhique.

La fin d’un tel personnage ne pouvait, selon l’invariable coutume des biographes orientaux, être que surnaturelle ; aussi ne possédons-nous sur ce sujet que des légendes extravagantes :

Le sage, estimant son œuvre achevée, avertit le roi qu’il va quitter le Thibet afin de poursuivre plus loin sa propagande. Accompagné du souverain, de la Cour et d’une masse considérable de disciples, il se dirigea vers la frontière du Népal. Quand il y fut parvenu, un nuage et un arc-en-ciel se montrèrent. Au milieu du nuage on vit un cheval ; ce cheval portait une selle d’or et d’argent. Les oreilles frémissantes, il descendit vers la terre. Il hennit et, dans son hennissement, on entendit : « Voici un trône d’or, un trône de jade. Le nom de ce cheval est roi des chevaux » (Valâha). Une troupe nombreuse de Dâkinis entourait le cheval… Padmasambhava, s’élevant du sol, alla à leur rencontre : « Roi, reine, et vous tous qui avez embrassé la doctrine, dit-il, persévérez dans la justice. Je vais vers le couchant… Je veux gagner les Râkshasis (démons féminins) à la doctrine du Bouddha… La vie éternelle est à qui a l’amour… Je vous garderai à jamais !… »

« Il sauta alors sur le cheval qui s’élança à travers les nues. Le roi et sa suite le suivaient des yeux en pleurant à haute voix. Alors Padmasambhava se retourna et ajouta : « Restez fidèles à la doctrine comme si vous étiez en face de la mort et des maladies. Si vous aspirez à la paix éternelle, vouez-vous à la doctrine… Il ne vous est point permis de me suivre… Vous me retrouverez… On me cherchera sans fin !… »

« Il parla ainsi, puis il s’éleva. Le roi et sa suite étaient tels que des poissons sur le sable… Lorsqu’ils regar-