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Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/47

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L’ÉGOÏSTE

modeste sphère pour s’élever au gouvernement de Patterne Hall. Par contre, elle pouvait compter sur un parti hostile à Willoughby. D’abord les deux ou trois révolutionnaires, fatigués du joug, et que l’on trouve toujours en Angleterre, dès qu’une agitation se produit ; de plus, un grand nombre de sympathiques nés, toujours prêts à pleurer ; et de ci de là une âme de bon Samaritain prompte à secourir les pauvres humanités en détresse. L’événement passa non dramatisé. Lætitia, selon sa coutume, vint à l’église, la mine modérément dévote et elle accepta des invitations à venir au château. Elle assista à la lecture des lettres de Willoughby et, quoique son nom n’y fût point mentionné, elle en nourrit ses chimères. Jamais la note menaçante du pathos ne la heurta.

Ainsi, bientôt le cœur public se referma.

À présent qu’on n’y voyait plus clair, on lui trouvait l’esprit trop mesquin pour devenir Lady Willoughby de Patterne. Elle n’aurait pas su garder son rang. Il devait s’être aperçu à qui il avait affaire, et pour gagner le dessus sur l’angoisse du premier amour, il était parti. Tranquille à présent, s’il fallait en juger par la teneur des lettres, des lettres vraiment incomparables. De les lire, lady Busshe et Mrs Mountstuart Jenkinson se délectaient. Sir Willoughby apparaissait comme un splendide spécimen des jeunes lords insulaires, dans ces lettres datées des principales villes des États-Unis d’Amé-