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Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/63

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L’ÉGOÏSTE

les cierges allumés, puis, un étranger survenant, soudain elles éteindront les flammes de vestales, et vous feront servir d’engrais au jardin de leur cœur pour une nouvelle fleur d’amour. Sir Willoughby le savait ; il avait été l’étranger ; et il connaissait les sentiments de l’étranger envers son prédécesseur et envers la dame.

Il tendit un piège à Lætitia, parla de lui et de ses plans ; le projet d’une fuite en Italie. Tentant ? Oui, mais c’est en Angleterre que l’on vit d’une vie morale bien supérieure. L’Italie regorge de beauté sensuelle, mais la beauté de l’âme, c’est la vôtre : « Je connais très bien l’Italie. Souvent j’ai souhaité d’y être votre cicerone. Dans l’état où sont les choses, j’y voyagerai avec des gens qui connaissent le pays aussi bien que moi et je ne serai guère enthousiaste… si vous êtes ce que vous avez été ? » Il fut plus d’une fois coupable de cet entrelacement perplexe de deux personnes en une même phrase. Et pendant qu’il ne parlait que de lui-même, elle croyait à sa condescendance. Parfois il parlait surtout d’elle, l’admirant d’abord pour les soins qu’elle prodiguait à sa mère ; et il souhaitait de la présenter à Miss Middleton ; il désirait son opinion sur Miss Middleton, car il se confiait à son intuition pour pénétrer les caractères ; jamais il ne l’avait vu errer.

— S’il vous était possible de faire erreur, Mrs Dale, je ne serais pas si certain de mai-même. Vous voyez que je m’attache à la haute opinion que je me suis