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Page:Meschinot - Les Lunettes des Princes.djvu/16

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VII
ET LES LUNETTES DES PRINCES

qui lui prouve par maint exemple tiré de l’histoire sacrée et profane, de la Fable, et même du Roman de la Rose, qu’il n’a rien à envier aux puissants et aux heureux de la terre, que cette vie n’est qu’un temps de douloureuses épreuves. Il s’endort sur ces funèbres impressions. Mais la prévoyante Raison vient, sous forme de songe, lui montrer qu’elle n’entend pas l’abandonner à son malheureux sort. Elle lui apporte un petit livre, intitulé Conscience, puis des Lunettes destinées à éclaircir le sens du livre; sur l’un des verres est écrit Prudence, sur l’autre Justice; l’ivoire qui les enchâsse se nomme Force, et le fer qui les joint Tempérance, Meschinot s’éveille et cherche la Raison, qui a disparu; mais il trouve le livret au chevet de son lit, et, grâce aux lunettes, il y déchiffre de belles pensées qu’il formule en poétiques et morales réflexions sur les quatre vertus qui feront désormais la règle de sa vie.

Ces naïfs artifices de composition, cette personnification des vertus, cette préférence pour l’allégorie mystique, rattachent les Lunettes des Princes aux plus anciens monuments de notre poésie. Quoique placé au seuil du XVIe siècle, à l’aurore de la Renaissance, Jean Meschinot appartient tout entier au Moyen-Age; il est plus vieux d’allures que Villon, qu’Eustache Deschamps, et, des poètes