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ii. — histoire de charles martel

tel et le noble duc Gerard de Roucillon furent paciffiés ensemble de la grant guerre que ilz avoient menée l’un contre l’autre, selon ce que declaire l’un des livres sur ce composé et escript en vieille rime ; si convient prendre la peyne de vous reduire d’icelle rime en prose, et vous de le lire et entendre, se bon vous semble, une autre maniere de pacification que je ay trouvée et veue en ung autre livre rimé pareillement, lequel racompte du gentil duc si amplement que il declaire de ses fais jusques a sa fin, et sa mort meisme contient cestuy derrenier livre, et parle de son cousin Fourques quy toujours estoit en la prison du roy Charles Martel, puis vous racomptera comment (fol. vc xix, v°) l’église de Veselay fut fondée par beaulx miracles et de la vie de la noble duchesse Berthe, sa femme, qui vesquy moult saintement, mais de sa fin ne racomptera point l’istoire, car elle ne parlera fors jusques a la fin du duc. Et de la mort du roy Charles Martel racomptera l’istoire en ung autre livre subsequent, lequel fera mention de son filz Pepin le petit, lequel fut en son temps garny de grant vaillance, jasoit ce qu’il fust de petite corpulence et stature. Si reprendra l’istoire a racompter du prince Gerard quy estoit au tournoy, ou luy et sa compaignie regardoient jouster les barons auprès de Buillon, la ou elle ploura mainte lerme en ramenant a memoire le temps passé, tellement que ses lermes cheoient sur la face de son seigneur quy son chief avoit mis ou giron de la dame ainsi comme par ennuy[1]. Et ce que je diray, a celle fin que ce ne semble reditte aux liseurs ou aux escoutans abregeray couramment tout le mieulx que je pourray, jusques a ce que la matiere soit changie que vous avez ja entendue. Si pourrez croire lequel que mieux vous semblera digne pour y adjouster foy, car en deux manieres ne peurent les deux princes estre veritablement pacifiés. Et pour tant que je meisme ne le pourroie croire, vous fay je recitation de ce que j’ay trouvé par escript comme dit est. Et puis par ce croire que tous livres ne se ressemblent mie, combien qu’ilz parlent tout d’une matiere.

Quant le desolé prince Gerard se senty moullié des lermes quy des yeulx de la dame cheirent sur sa face, et il luy eust

  1. Cf. la chanson, § 534.