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girart de roussillon

pelure d’oignon (?), car celui qui échappe à l’un est repris par l’autre. Là meurent par l’épée tant de vaillants combattants, tant de nobles guerriers ! là tombèrent tant d’hommes dont pas un ne se releva, ni jamais ne se relèvera jusqu’au jour du jugement pour lequel je me prépare !

165. La bataille fut forte et fière, comme vous l’entendez. Les compagnies se précipitent les unes sur les autres et se massacrent ; puis elles commencent à se lasser et à mourir, les las se reposent, les frais entrent dans la lutte. Girart leur crie d’attaquer, et Charles encourage les siens.... Hé Dieu ! ils sont destinés à rester sur le terrain ! De terres étrangères ils sont venus mourir.

166. La bataille de Vaubeton avait été prédite cent ans d’avance en un vieil écrit[1]. La cinquième partie des hommes y reçut martyre sans jugement[2]. Contre chaque captal il y a un baron : voici le duc Thierri contre Odilon, et don Seguin le fils de celui-ci contre Aimon, contre Auchier Aimeri, le seigneur de Noion, contre le comte Guinart, le brabançon qui était duc de Bavière. On aurait plus tôt fait d’aller à Rome, au pré de Néron[3], que de compter seulement les barons. C’est entre eux une lutte à mort.

167. Odilon voit Thierri qui a tué son frère (Drogon)[4] : il ne remet pas sa vengeance, il se tourne de son côté et d’un coup de lance le jette à bas du cheval gris ; puis il crie son enseigne : « Dunort ! Dunort ! cherchez maintenant qui vous emporte ! »

168. La bataille dont vous venez d’entendre le récit eut

  1. Interprétation aventurée ; les deux mss. sont d’accord et le mot à mot serait : « Avant que fut faite la bataille de Vaubeton, elle avait été prêchée (ou plutôt, selon P., il avait été prêché) cent ans dans le vieux sermon. » Qu’est-ce que cela veut dire ?
  2. Jutgamen no P. (v. 2201) ; la leçon d’Oxf., qui substitue fon à no, ne me paraît pas donner un sens bien clair ; p.-ê. « ce fut un jugement », c.-à-d. une bataille considérée comme jugement de Dieu ?
  3. Le Berlant du § 146 ?
  4. Voy. § 151.