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girart de roussillon

234. Ensuite parla don Aimon de Vaugruage, père de Carbonel de Mont-Brisage : « Sire, ne mandez pas à Girart de telles menaces : envoyez un message pacifique, portant qu’il vienne vous faire droit à votre résidence, comme firent les hommes de son lignage. Et s’il consent à vous livrer de bons otages, vous ne perdrez pas votre hommage du comte, non plus qu’il ne perdra votre seigneurie. Si, par sa folie, il s’y refuse, mandez votre gent, votre grant baronnage. Vous n’aurez pas un denier à dépenser pour guides : je saurai bien vous mener par tout le voyage. Et vous, occupez sa terre, plaine et bois, n’en sortez pas, quoi qu’il arrive, jusqu’à tant que du tort qu’il vous a fait, il vous ait donné bon gage. Celui qui sera chargé de ce message ne doit pas être un homme léger : il n’y faut ni couardise, ni lâcheté, mais prouesse, valeur et courage. »

235. Après parla Tibert de Vaubeton[1] : c’était un excellent chevalier. Il portait le bouclier depuis plus de cent ans, et c’était un proche parent du roi Charles : « Il y a une chose, sire roi, qui ne me plaît pas : c’est qu’il y ait querelle entre toi et Girart, et que tu inculpes à tort ton baron avant de savoir de qui vient la faute. Mais crois en plutôt Aimon et ce que te conseillent tes barons. Envoie dire au comte, à Roussillon, qu’il vienne te faire droit en ta maison, comme son lignage le fit au tien. Qu’il amène comme otages le comte Fouque, Boson et Seguin de Besançon et cent chevaliers de valeur. S’il ne le veut faire, s’il dit non, rejette tout conseil qu’on pourra te donner, jusqu’à tant que tu le tiennes en ta prison. » Charles entendit ces paroles avec contentement : il appela à lui Pierre, le fils du sage Gautier, le frère d’Alon, ces deux derniers étaient fils de Tibert de Vaubeton. « Pierre, tu iras, de ma part, à Roussillon pour conter à Girart ce que tu viens d’enten-

  1. Rainier P. (v. 3117) L. porte Tiebert et non Tiebaut, comme a lu à tort M. Fr. Michel (p. 312).