315. « Certes, je ne donnerai pas conseil, le sachant, qui fasse de toi un fou, un félon, un traître ! Mais va trouver Auchier de Saint-Macaire[1], c’est un chevalier franc et de bonne race ; mandez au roi que vous irez lui faire droit, où il voudra mais qu’il se retire en France, et donnez comme otages moi et mon frère. — Fouque, » dit Seguin, « vous ne l’aimez guère, quand vous lui conseillez un arrangement honteux. Il vaudrait mieux qu’il eût perdu la cité de Caire[2] et mille marcs de la terre que tint son père, avant que le roi passât Rancaire[3] sans bataille. »
316. Girart entend Seguin, et ses foles paroles lui plurent : Que Dieu me maudisse, don Fouque, » dit-il. « quand je suivrai votre conseil ! Puisque le roi s’est avancé jusque-là avec ses vauriens, Normands, Français, Bretons, afin de me ruiner, tenez-moi pour aussi lâche qu’un renard[4], dès qu’il demande bataille, si je ne la lui donne ! » Fouque, quand il l’entendit parler ainsi, fut si affligé que depuis il ne lui donna plus aucun conseil, bon ni mauvais.
- ↑ Anchier cel de Marsaire P. (v. 4147). Ce doit être l’Auchier des §§ 166, 304, 317 ; l’Auchier, renommé par sa loyauté, du § 30.
- ↑ Raire P. (v. 4153).
- ↑ Leçon de P. (v. 4153) ; Oxf. senz caire, ce qui n’offre guère de sens ; L. Que K. la trespast u sanz contraire, leçon refaite, où la rappelle Caire mentionné précédemment. J’adopte la leçon de P., parce que Rancaire est un nom de lieu qui figure ailleurs dans le poëme (P. v. 6475, même leçon dans Oxf. et sans doute dans L. s’il n’y avait dans ce ms. une lacune à cet endroit).
- ↑ On a déjà vu plus haut le renard symboliser la lâcheté, p. 66, n. 1. Il y a ici deux vers (P. vv. 4163-4) dont le premier, bien que nécessaire au sens, est omis par Oxf. et L, mais qui se retrouvent identiquement les mêmes précédemment, au § 150 (P. vv. 1929-30), et dont le premier reparaîtra plus loin (P. v. 4429). Ce vers. Tenetz mi per revit a volpilho, a été bien expliqué par Diez, Kritischer anhang zum Etym. Wœrt., 1859, p. 25. Revit (reveiz Oxf. pour proatz de P. v. 1682) est le français revois, sur lequel voy. Scheler, Berte au grand pied, p. 157-9.