il voit la mêlée la plus épaisse, il pénètre comme un coin. Il va frapper Auchier de Mont Saint-Proin[1]. Celui-ci se mit en défense et lui fendit l’écu au dessus du poing, et lui défit tout le pan du haubert. Gace, à son tour, le refrappa sous le visage : le haubert[2], si fort qu’il fût, céda. Gace lui passa lance et enseigne par le cou et l’abattit mort loin de son cheval. Dans la mêlée, il n’y a Allemand, Saxon ni Bourguignon qui frappe mieux que lui.
336. Voici par le champ Alon, le fils d’Ansel. Il portait un haubert jaseran qui se rejoignait au chapeau ; il avait lacé le heaume de Raimon Borel[3] et ceint l’épée de Milon d’Urgel. Il était armé de la lance et son écu neuf venait de Bordeaux. Il chevauchait un jeune cheval couleur de fer, et son gonfanon était brodé d’or. Il vint tout d’un trait par le chaume, poussant le cri de Charles Martel. Voici de l’autre part Giraut de Mont-Revel. Quand il entendit le cri de Charles Martel, il en fut irrité. Ils vont se défier l’un l’autre et l’un des deux videra les arçons.
337. Giraut était un chevalier preux et vaillant. On ne pouvait imaginer un homme mieux bâti. Il était homme du comte Girart et son parent. Ce lui fut pénible d’entendre crier l’enseigne de Charles. Il se jeta sur Alon, qui, se sentant frappé, le frappe à son tour, lui fausse la broigne de Saint-Maixent, et le jette mort à terre, sur la face, devant Doitran[4] de Saint-Laurent, sous les yeux d’un homme qui sut en prendre vengeance.
338. Doitran pique des deux et frappe Alon par la poitrine, sur le haubert, à travers le hoqueton. Il lui mit dans le corps
- ↑ Mont Saint-Droin L., le vers manque dans P.
- ↑ Le haubert couvrait le cou et une partie du visage.
- ↑ Un Raimon Borel fut comte de Barcelone de 992 à 1018 ; voy. l’Art de vér. les dates, II, 292 ; P. de Bofarull, Condes de Barcelona vindicados, I, 197.
- ↑ Doltrans P. (v. 4533-5). Sans doute le Doitran qui figure au § 252, parmi les hommes de la mesnie de Girart.