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girart de roussillon

et nombreuse de soudoyers bavarois et allemands, qui ne demandent qu’à se battre. N’envoyez pas en avant ni hommes de pied ni éclaireurs, mais chevauchons dès ce soir, au coucher du soleil, et soyons en face d’eux au point du jour. Si nous pouvons chasser Charles du champ de bataille, je ne donnerais plus un gant de sa guerre. Il sera ruiné lui et ses enfants. »

477. Girart goûta fort ce discours. Les paroles de Boson lui rendirent le courage. « Seigneurs, » dit-il, « je ne puis continuer la guerre plus longtemps, car je n’ai plus rien à donner ni à recevoir[1]. J’ai perdu les barons qui me devaient le service militaire. J’aime mieux en finir d’un coup que de languir dans une longue anxiété. — Faites en, » dit Fouque, « comme il vous plaira. » Et là-dessus ils s’en vont.

478. C’est sur cet avis qu’ils se séparèrent. On suivit le conseil de Boson qui, en une autre occasion, leur avait été d’un grand secours. Girart monta sur le cheval balzan aux longs crins. Il se rendit dans les prés sous Dijon, où les barons avaient planté leurs tentes. Il leur adresse à tous force remercîments et les prie, au nom de Dieu, de ne pas bouger jusqu’au soir. Alors ils se mettent en marche, passent sous le couvert du bois, et, au point du jour, arrivent sous Pui-Aigu ; ils descendirent de cheval dans la plaine sous Châtillon. Dieu veille sur eux ! Car il y aura encore bien des écus neufs de brisés.

479. Ils descendent, au point du jour, sous Châtillon. En la cour de Girart, il y avait un vavasseur né du meilleur lignage de France. Il avait été pris à la bataille sous Vaucouleurs, où Girart vainquit l’empereur Charles[2]. Le comte n’avait exigé de lui aucune autre rançon que son service.

  1. Mot à mot « ni à tenir ». Il veut dire qu’ayant perdu la plus grande partie de ses terres, il n’a plus de revenu.
  2. Ci-dessus, §§ 412-414.