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iii. — l’ancienne et la nouvelle chanson

C’est là, en quelque sorte, le premier acte ou, si l’on veut, le prologue du poème, mais c’est un prologue qui se rattache assez mal à la pièce. Dans aucune partie du poème, il n’est fait allusion à l’origine grecque des deux sœurs. Et cependant, lorsque Girart, vaincu et banni, est réduit à gagner sa vie en portant des sacs de charbon, il semble que lui ou sa femme auraient dû avoir la pensée de chercher un refuge auprès de l’empereur d’Orient. Il y a plus : tel des faits exprimés au commencement du poème est en contradiction absolue avec ce qui se lit dans la suite. Ainsi, au § 31, lorsque Girart se décide, sur les instances du pape, à céder à Charles Elissent, à laquelle il avait été fiancé, et à prendre Berte, qui d’abord avait été destinée au roi, il spécifie comme condition qu’il sera relevé de son hommage et tiendra son fief en alleu. Et, plus loin, au § 33, on lit en propres termes : « Il (Girart) fut relevé de son hommage et reçut son fief en alleu ». Mais, plus tard, lorsque, la guerre déjà engagée entre Charles et Girart, des négociations ont lieu en vue de rétablir la paix, il n’est plus question de l’acte solennel par lequel Girart a obtenu sa terre en alleu. Girart soutient, à la vérité, que Roussillon (§§ 54, 119) est un alleu, mais la raison qu’il invoque est que déjà son père possédait ce château à pareil titre (§ 64). Plus nous avançons dans le poème, plus la contradiction s’accentue : « Tu ne peux nier ni escondire, » dit Odilon à Girart, son neveu, « que tu ne sois l’homme lige de Charles ni qu’il soit ton seigneur. Tu ne peux donc le vaincre en bataille sans forfaire ton fief » (§ 177). Et, à la page suivante, l’un des barons de Girart exprime la même idée avec plus de précision encore : « Girart est devenu son homme lige (l’homme de Charles) ; je fus présent à l’hommage,