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introduction

se résigne Girart après avoir été vaincu à Civaux, sur les bords de la Vienne[1], et il la soutient pendant cinq ans, sans jamais, nous dit le poète, se laisser aborder en rase campagne par le gros des forces de Charles (§ 416). Pour éviter ces guerres indéfiniment prolongées et les ruines qu’elles causaient, on convenait parfois de se rencontrer à jour fixe en un lieu déterminé. C’est ce qu’on appelait une bataille aramie, c’est-à-dire convenue entre les parties adverses par un engagement solennel. Les batailles de Vaubeton et de Civaux (§§ 126 et 373) sont des batailles aramies[2]. On attribuait souvent à ces rencontres déterminées d’avance la valeur d’un jugement de Dieu. Tel fut, par exemple, le cas, pour citer un fait historique, de la bataille de Fontenai, en 841. Divers passages du poème montrent qu’il était d’usage, avant d’engager une grande bataille, de consulter les sorts[3].

Dans les combats de Girart de Roussillon, on ne voit guère figurer de gens de pied, sinon en qualité de convoyeurs (§§ 441, 627). Les masses de cavalerie conduites sur le champ de bataille dépassent toute vraisemblance. Odilon, l’oncle de Girart, chevauche à la tête de soixante mille Provençaux tous à cheval (§ 156)[4]. Cependant Girart compte parmi ses alliés les Navarrais et les Basques dont les armes sont des dards et un épieu, et qui, sans doute, combattent à pied (§§ 136, 342). Les sergents sont

  1. Voy. p. 189, n. 3.
  2. Voy, Du Cange, éd. Didot, I, 90, arramire belium.
  3. Voy. p. 185, n. 4.
  4. L’exagération est bien plus grande dans Rolant. Les dix échelles que Charlemagne forme au moment de livrer bataille à Baligant vont en croissant, de quinze mille hommes, chiffre des deux premières, jusqu’à cent mille, chiffre de la dernière. Le total s’élève à 360,000 combattants ! (Rolant, vv. 3014-85).