Page:Meyerson - La déduction relativiste, 1923.djvu/284

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Il ne sera peut-être pas superflu, afin de bien préciser le sens de cette affirmation, de montrer à quel point elle correspond au rythme réel de l'évolution du savoir, d'avoir recours à un exemple précis. Nous le choisissons dans le domaine des conceptions chimiques, dont nous allons maintenant considérer la genèse à un point de vue tout à fait général.

Et d'abord, qu'est-ce à proprement parler que la chimie, et comment se fait-il que l'on ait éprouvé le besoin de constituer cet ensemble de phénomènes, qui ne forme, de toute évidence, qu'un chapitre de la physique, en science quasi indépendante de celle-ci?

Nous avons dit, dans notre premier chapitre, que l'explication la plus directe et la plus complète du réel consiste à nier le divers, aussi bien dans le temps que dans l'espace. Mais nous avons reconnu aussi que cette manière de voir, qui est celle de Parménide, réduirait toute science à l'absurde. Le sens commun, pour y échapper, crée comme substrat, comme explication de la sensation changeante, le monde des objets. La science, à son tour, en cherchant à rendre cette explication moins inconsistante, est amenée à s'occuper en première ligne du changement dans le temps. Et elle découvre alors qu'à côté des' propriétés que la matière montre plus ou moins accidentellement, qui paraissent et disparaissent avec facilité, il y en a d'autres, qui semblent bien plus fortement liées à la nature du corps, qui disparaissent plus malaisément et, une fois disparues, reparaissent aisément. Or, nous le savons, la science cherche à écarter, par ses explications, tout ce qui est