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cienne réputation ; il entra en Portugal en 1581, gagna deux batailles en trois semaines, chassa don Antonio, se rendit maître de Lisbonne, et soumit tout le Portugal à Philippe II. Il s’empara des trésors de la capitale, et permit à ses soldats d’en saccager les faubourgs et les environs, avec leur violence et leur rapacité accoutumées. Philippe, indigné, fit rechercher la conduite de son général, qu’on accusait d’avoir détourné à son profit les richesses des vaincus : « Je n’en dois compte qu’au roi, dit le duc d’Albe ; et, s’il me le demande, je ferai entrer dans ce compte des royaumes conservés, des victoires signalées, des siéges difficiles, et 60 ans de service. » Philippe craignit une sédition dans l’armée, et fit cesser les recherches. Le duc ne vécut point assez pour jouir des honneurs et des récompenses qu’il avait mérités par son dernier exploit ; il mourut le 12 janvier 1582, à 74 ans, ayant horreur, dit-on, du sang qu’il avait fait répandre. Il fut, sans aucun doute, le plus habile général de son siècle, et c’est surtout dans les opérations lentes et savantes, dans la partie de la guerre la plus difficile, qu’il excella. Sa campagne contre le prince d’Orange, en 1568, est, dans ce genre, un des plus beaux exemples que les militaires puissent suivre ; si on le pressait d’attaquer, il répétait sa maxime favorite : « De tous les événements, le plus incertain, c’est la victoire. » Ses actions et ses paroles donnent une idée si complète de son caractère, qu’il serait inutile d’y rien ajouter, et de rapporter le portrait que Ravnal en a tracé dans son Histoire du Statoudhérat. Il suffira de dire qu’il avait le maintien et la démarche grave ; l’air noble et le corps robuste ; qu’il dormait peu, travaillait et écrivait beaucoup ; que sa jeunesse fut raisonnable, et que ce fut dans le tumulte même des camps qu’il se forma à la politique. On prétend que, dans 60 ans de guerre contre différents ennemis, jamais il n’a été battu, ni surpris, ni prévenu. Sa vie a été publiée à Paris, 1698, 2 vol. in-12. On avait imprimé à Amsterdam, en 1620, un Miroir de la tyrannie des Espagnols, perpétrée aux Pays-Bas par le duc d’Albe, in- 4º, fig. B—p.

ALBENAS (Jean Poldo d’), naquit en 1512, à Nîmes, et non en Vivarais, comme l’a dit Castel dans ses Mémoires sur le Languedoc. Sa famille était noble ; mais elle fut moins distinguée par cet avantage que par les lumières de Poldo, et de Jacques d’Albenas son père. Les parents de Poldo l’avaient destiné au barreau, et il se mit de bonne heure en état d’y paraître avec éclat ; mais Nîmes étant devenue, en 1552, le siége d’un présidial, il y fut pourvu d’une charge de conseiller, qu’il exerça jusqu’à sa mort, avec distinction. Il cultiva les lettres et la jurisprudence ; son premier ouvage fut une traduction française de l’écrit de S. Julien, archevêque de Tolède, intitulé : Prognosticorum, sive de origine mortis humanæ ; de futuro sæculo, & de futuræ vitæ contemplatione, libri tres. Cette version obtint, lorsqu’elle parut, l’estime des savants ; elle fut bientôt suivie de celle de l’Histoire des Tahorites (hérétiques de Bohême), écrite en latin par Æneas Sylvius, avant qu’il devînt pape sous le nom de Pie II. D’Albenas publia ensuite un Discours historial de l’antique et illustre cité de Nîmes, Lyon, 1557, in-fol, avec des planches assez grossièrement gravées en bois, où les mesures et les règles de la perspective ne sont pas toujours observées ; mais qui donnent cependant, des monu-