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fut très-mal reçu à la cour ; sur quoi un seigneur dit à la reine qu’il était préadamite. La reine lui demanda ce que cela voulait dire : « C’est que je ne crois pas, madame, lui répliqua-t-il, que le Père Adam soit le premier des hommes[1]. » A. B-t.


ADAM (Jacques), de l’Académie française, naquit en 1663, à Vendôme. Comme il était le plus jeune de huit enfants, ses parents le destinèrent à l’état ecclésiastique, et il fut placé chez les pères de l’Oratoire, qui dirigeaient le collège de sa ville natale. Après qu’il eut achevé ses études d’une manière brillante, ses maîtres l’envoyèrent à Paris avec une lettre pour Rollin. En voyant un enfant à peine âgé de quatorze ans, et qui paraissait encore plus jeune, Rollin eut peine à se persuader qu’il avait sous les yeux le sujet qui lui était recommandé. Mais Adam montra dans toutes ses réponses tant de sagesse et de modestie, qu’il n’hésita pas à le présenter à l’abbé Fleury, qui cherchait un homme instruit pour l’aider dans ses recherches sur l’histoire ecclésiastique. Fleury en fut très-satisfait. Charmé de sa douceur, de l’étendue de ses connaissances et de son application au travail, il se l’associa non-seulement dans ses recherches historiques, mais dans l’éducation du prince de Conti. Après la mort de Fleury (1723), Adam fut élu son successeur à l’Académie française. D’Alembert raconte, dans l’éloge qu’il a donné de cet académicien, qu’Adam n’étant pas gentilhomme, le prince de Conti, son élève, pour concilier ce qu’il croyait devoir aux préjugés avec le désir de lui donner le titre de gouverneur de son fils, lui proposa de prendre momentanément l’habit ecclésiastique. Mais Asam s’y refusa[2], ne voulant pas adopter un habit qui lui imposerait des devoirs qu’il ne pourrait remplir ; après quelques jours de réflexion, le prince rendit justice à sa délicatesse, et le nomma sans condition[3]. Il resta l’ami de son élève, devint secrétaire de ses commandements et chef de son conseil, et, dans ces diverses fonctions, justifia sa confiance. Il l’accompagna au siége de Philisbourg (1734). mais les fatigues de la campagne épuisèrent ses forces. Des lors il ne fit que languir, et mourut d’une colique, à Paris, le 12 novembre 1735, laissant plusieurs enfants sans fortune. Il eut pour successeur à l’académie française l’abbé Seguy. Adam possédait à fond les langues anciennes, et savait bien la plupart de celles de l’Europe. Ses confrères le nommaient un dictionnaire vivant, et ils le consultaient toujours avec fruit. Il a traduit de l’italien les Mémoires de Montécuculli (voy. ce nom), et la Relation du cardinal de Tournon, imprimée dans les Anecdotes sur l’état de la religion à la Chine. (Voy. Tournon.) Il a eu part à la traduction de l’Histoire universelle de Jacques-Auguste de Thou. (Voy. ce nom, depuis 1543 jusqu’en 1607.) Mais son principal ouvrage est une traduction complète d’Athénée qu’il se proposait de publier avec une nouvelle édition du texte grec dans lequel il avait corrigé 2,000 passages. Le manuscrit de cette traduction, qu’on croyait perdu, fut enfin retrouvé, et remis à l’abbé Desaunays, garde de la bibliothèque du roi, pour le publier. Mais informé que Lefebvre de Villebrune s’occupait depuis longtemps d’une version d’Athénée, l’abbé Desaunays lui confia celle d’Adam pour en tirer le parti qu’il jugerait le plus convenable. Lefebvre n’en a publié que les deux premiers livres, après les avoir corrigés, ayant eu, dit-il, des ressources qu’Adam n’avait pu avoir de son temps. Il ajoute que le surplus de cette traduction lui avait été tout à fait inutile (Athénée, 1er avertissement, p. 7}. Un exemplaire de Pindare, couvert de notes manuscrites d’Adam, a été vendu à Paris en 1830 (Cat. de M. Nodier, no 288). W-s.


ADAM (Lambert-Sigisbert), sculpteur, né à Nancy, le 10 février 1700, fut le fils aîné de Jacob-Sigisbert Adam, qui exerçait la sculpture, et s’était acquis dans sa province quelque célébrité. À l’âge de dix-huit ans, il se rendit à Metz ; mais le désir d’étendre sa réputation le conduisit bientôt à Paris, où il arriva en 1719. Après quatre années de travaux, il obtint le premier prix, et alla, en qualité de pensionnaire du roi, à Rome, ou il passa dix ans. Le cardinal de Polignac lui fit restaurer douze statues en marbre, dites la Famille de Lycomède, que l’on venait de découvrir dans les ruines du palais de Marius. Adam s’acquitta avec succès d’un genre de travail qui ne donne pas aux artistes une réputation proportionnée aux difficultés. Il restaura également divers morceaux de sculpture antique dont le roi de Prusse fit l’acquisition dans la suite, et qui furent transportés à Berlin. Lorsqu’on eut l’intention d’ériger à Rome le vaste monument connu sous le nom de Fontaine de Trévi, Adam fut l’un des seize sculpteurs que l’on chargea de donner des dessins à ce sujet, et sa composition, riche et spirituelle, fut adoptée par le pape Clément XII ; mais les artistes italiens, toujours jaloux des talents ultramontains, firent différer l’exécution de cette fontaine. Au moment où Adam allait enfin s’en occuper, les offres avantageuses que lui fit le gouvernement de sa patrie le portèrent à revenir en France. Il partit, après s’être fait agréger à l’académie de St-Luc de Rome, et à celle de Bologne. Sa première production, après son retour en France, fut un groupe de la Seine et la Marne, pour la cascade de St-Cloud. Il travailla ensuite à Choisy, pour le duc d’Antin, etc., et fut reçu, le 25 mai 1737, membre de l’Académie, dont on le nomma dans la suite professeur. Son morceau de réception représentait Neptune calmant les flots, et ayant à ses pieds un triton, et non Prométhée enchainé au rocher, comme l’ont dit quelques biographes. Ce dernier ouvrage fut le morceau de réception de Nicolas-Sébastien Adam, frère de Lambert-

  1. Ce mot a été aussi attribué à Voltaire. Aurillon, dans ses Mélanges critiques de littérature, publié par son fils, Bâle, 1696, 2 vol. in-12, t. 1, p. 38. et dans la réimpression faite par Leclerc en 1701, in-12, et Amsterdam. 1706, in-12, p. 28, attribue ce mot à madame Marie Dumoulin ; ainsi Voltaire n’en état que l’écho, suivant ce dernier témoignage. On le trouve encore attribué a Benserade, dans les Annales poétiques, t. 22. C-T-Y
  2. Malgré cela quelques biographes font d’Adam un abbé.
  3. Ceci n’est pas exact. Un laïque seul pouvait avoir l’emploi et le titre de gouverneur ; un abbé n’était jamais que précepteur. Ne serait-ce pas le contraire qu’il faudrait lire ? Puisque Adam fut nommé gouverneur, ne céda-t-il pas aux instances du prince, et ne quitta-t-il pas l’habit ecclésiastique pour prendre l’habit séculier ? V-VE