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à un rare degré le talent de communiquer ce qu’il savait. A. B-t.


ADAM (Robert), architecte célèbre, né en 1728, à Kirkaldy, dans le comte de Fife en Écosse, fit ses études à Édimbourg. Il manifesta de bonne heure un goût décidé pour les arts du dessin, et s’appliqua avec ardeur à l’étude de l’architecture. Il fit le voyage d’Italie aux frais du gouvernement d’Angleterre, qui, à l’imitation de celui de France, entretient à Rome un certain nombre d’élèves. Avant de revenir dans sa patrie, il visita différentes parties de l’Italie, pour y étudier les monuments des arts, et il y conçut le plan d’un ouvrage qu’il publia ensuite, et dont on parlera plus en détail à la fin de cet article. De retour en Angleterre, il s’établit à Londres, ou il construisit plusieurs édifices qui lui firent une grande réputation, quoiqu’ils n’aient rien de distingué dans les grandes parties de l’architecture. Le talent particulier de l’artiste ne se montre que dans l’art des distributions intérieures, et surtout dans les ornements, où il a montre de l’originalité et de la variété, et quelquefois même de la grandeur. Il fut nommé, en 1762, architecte du roi ; mais, en 1768, il donna sa démission de cette place, parce qu’il fut nommé député au parlement britannique, comme représentant du comté de Kinross en Il mourut, en 1792, de la rupture d’un vaisseau dans la poitrine, et fut enterre avec une pompe extraordinaire ; beaucoup de personnes de distinction et un grand nombre d’artistes accompagnèrent son convoi, et sa famille lui a fait élever un monument dans l’abbaye de Westminster. La noblesse de son caractère, la supériorité de ses talents et l’étendue de ses connaissance faisaient rechercher sa société. Il fut l’ami de Hume, de Robertson, d’Adam Smith, de Ferguson, etc., et vécut dans l’intimité de plusieurs autres personnages illustres de la Grande-Bretagne. Il a construit un grand nombre d’édifices, tant publics que particuliers, à Édimbourg et à Glascow ; et ces bâtiments sont d’un goût d’architecture plus noble et plus pur que ceux qui existaient auparavant dans ces deux villes. Il a construit aussi, dans plusieurs campagnes, des châteaux et des maisons particulières dont on ne peut pas louer le bon goût de composition. La plupart sont dans le style gothique ; mais en cela l’on peut croire qu’il s’est plutôt assujetti au goût des propriétaires qu’il n’a suivi le sien propre : c’est une distinction qui parait naturelle aux Anglais. Les principes de l’architecture grecque y ont été importés par des hommes d’esprit qui avaient voyagé en Italie ; ils ont été suivis par quelques architectes qui ont bien étudié leur art. Ils ont été appliqués avec succès à un assez grand nombre de bâtiments ; mais, en parcourant l’Angleterre, en examinant la multitude d’églises, de maisons et de châteaux, répandus dans les villes et dans les campagnes, on s’aperçoit que le goût dominant, et pour ainsi dire le goût national, est pour l’architecture gothique. Robert Adam s’était associé dans tous ses travaux un frère, architecte comme lui, mais qui avait plus d’habileté dans la partie mécanique de l’art que de génie et d’invention : ce dernier mérite appartenait tout entier à Robert. La plus considérable des constructions qu’ils ont faites a Londres est une suite de maisons bâties sur un plan uniforme sur le bord de la Tamise, et qui a conservé le nom d’Adelphi, comme étant l’ouvrage des deux frères. Un Anglais, qui a vu les ouvrages des Adam, et qui en parle en juge éclairé de l’art, mais avec une partialité que nous ne pouvons approuver, a écrit que le style de l’architecte écossais est certainement « très-supérieur à celui de tous les architectes français, sans exception, qui ont vécu sous Louis XV. » L’auteur de cet article ne connait point les bâtiments dont les Adam ont décoré Édimbourg et Glascow, mais il a vu ceux qu’ils ont construits à Londres, et il ne peut pas croire qu’ils aient fait nulle part rien de comparable à l’église de Ste-Geneviève, aujourd’hui Panthéon, et à l’école de médecine de Paris. La réputation que Robert Adam s’est acquise se serait concentrée dans son pays, s’il n’avait donné de son talent d’autres preuves qui l’ont fait connaître au dehors. Il a publié une espèce d’ouvrage périodique, consistant en dessins, particulièrement d’ornements d’architecture, qui ont contribué à répandre un meilleur goût pour tout ce qui tient à la décoration et à l’ornement, non-seulement en architecture, mais encore dans les manufactures et les arts où le dessin entre comme objet essentiel. Celle de ses productions qui assure le plus solidement sa réputation, est la Description des ruines du palais de l’empereur Dioclétien, à Spalatro en Dalmatie, dont il fit faire les dessins, et les gravures en Italie, et qu’il publia à Londres, en 1764, grand in-fol. Ce magnifique ouvrage, aussi intéressant par la grandeur du monument qu’il met sous nos yeux, que précieux par la beauté de l’exécution, est digne de faire suite aux Ruines de Palmyre et de Balbeck, que l’on doit aussi à des compatriotes de Robert Adam. Il a mis à la tête une introduction assez étendue et très-bien écrite, qui jette de nouvelles lumières sur l’architecture des Romains, dont il ne reste guère que quelques édifices publics, tandis qu’une foule de bâtiments élégants et superbes, habités par des citoyens de Rome, ont entièrement disparu. À peine reste-t-il quelques vestiges de ces maisons de campagne innombrables dont l’Italie était couverte, quoique les Romains eussent prodigué, pour les élever et les embellir, les richesses et les dépouilles du monde. Robert Adam déplore la destruction de toutes ces habitations particulières. Les ruines du palais de Dioclétien, à Spalatro, sont le seul monument de ce genre que le temps ait épargné : c’est le palais où Dioclétien, après avoir résigné l’empire, passa les neuf dernières années de sa vie. On connait le goût de cet empereur pour l’architecture ; il avait fait construire un grand nombre de beaux édifices : ses bains publics, qu’on voit à Rome, sont un des anciens bâtiments les plus magnifiques et les plus entiers qui se soient conservés. Tous ces motifs déterminèrent Robert Adam, lorsqu’il était en Italie, à entreprendre le voyage de Spalatro. M. Clérisseau, architecte français, dont on connait le talent et les connaissances dans les antiqui-