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toute sa vigueur. Sa réputation ne fut pas moins grande en Italie qu’en France, et ses vers eurent une heureuse influence sur la développement de la poésie italienne. Pétrarque lui accorde un glorieux témoignage de sa reconnaissance, lorsque, dans le 4e chant de son Triomphe de l’amour, il nous le montre à la suite du char du jeune dieu, parmi les poëtes immortels qui ont le plus dignement honoré son culte. « Je vis, dit-il, Pindare, Anacréon, Virgile, Ovide, Tibulle ; ensuite, à la tête des nombreux troubadours, je vis Arnaud Daniel, grand maître en amour, Ramband, l’amant de éeatrix de Montferrat, Aimeric (de Péguilain), Bernard (de Ventadour), Hugues et Anselme, et mille autres à qui la langue tint toujours lieu de lance et d’épée, de casque et de bouclier. » Il existe, dans divers manuscrits, environ cinquante pièces d’Aimeric de Péguilain. Raynouard en a publiés six en entier, et des fragments de huit autres. P-x.


AIMOIN, religieux de l’ordre de St-Benoit, et l’un des plus anciens historiens de France, naquit a Villefranche en Périgord, d’une famille noble de cette province. Sa mère était proche parente de Girauld, seigneur d’Aubeterre. Étant entré, des sa jeunesse dans l’abbaye de Fleury, il y fit ses études sous la direction du savant Abbon, qui brilla entre tant d’autres abbés du 11e siècle, illustres par leurs lumières et leurs vernis. Aimoin puisa dans les leçons de cet habile maître la connaissance et le goût des lettres et des sciences ; et sa vie tout entière fut employée à de doctes travaux. Il s’exerça dans des genres variés, mais l’histoire fut son étude de prédilection. Abbon, juste appréciateur du mérite de ce laborieux disciple, l’honora de son estime et de son amitié. Des désordres ayant éclaté à la Réole, abbaye soumise à Fleury, Abbon s’y rendit en 1004, afin de rétablir dans cette communauté la règle et les bonnes mœurs ; Aimoin accompagne son abbé dans ce voyage, et eut la douleur de le voir périr sous ses yeux, au milieu d’une sédition excitée par les moines rebelles. Après ce cruel événement, il revint à Fleury, ou il mourut vers 1008. Aimoin a laissé un esses grand nombre décrits : le plus important est son Histoire des Franks, qui commence avec la nation et s’arrête à la 10e année du règne de Clovis II (654) ; plus tard, elle a été continués jusqu’en 1465. L’auteur nous apprend lui-même, dans l’épître dédicatoire, que son dessein était de réunir et de coordonner les récits épars des annalistes et d’en former une narration suivie. Grégoire de Tours, Frégédaire, les Gestes des Franks, les Gestes de Dagobert, et quelques hagiographes lui ont fourni la plus grande partie de ses matériaux. L’ouvrage est procédé d’un tableau géographique de la Gaule, pour lequel il s’est contenté de copier Orose, Pline et St. Graal. « Quant à la manière dont il a exécuté son entreprise et mis ses matériaux en œuvre, il n’a point réussi a nous donner une histoire exacte et foncière. Il ne fait presque que désigner ou indiquer légèrement les faits, à l’exemple de Frédégaire, sans entrer dans les détails convenables. Il ne parle des guerres en particulier que fort modestement, et n’en développe ni les motifs, ni les causes, ni les suites, de quelque nature qu’elles soient. No-seulement il ne cite aucun des auteurs où il a puisé, mais il ajoute de son crû diverses choses à ce qu’ils disent, renverse l’ordre dans lequel ils le rapportent, et se trouve quelquefois en contradiction avec eux. » Ce jugement sévère, mais juste, attente l’impartialité des auteurs de l’Histoire littéraire. Il nous semble cependant que, sans être de complaisance envers les bénédictins, ou pourrait remarquer que l’idée de réunir par une histoire complète et suivie, les anneaux détachés de la chaîne des traditions franques et d’embrasser dans son ensemble le tableau du développement politique et social de la nation ; il nous semble, disons-nous, que cette idée n’a pu être conçue au 10e siècle que par un esprit d’une certaine portée historique et philosophique. L’histoire des Franks fut imprimée, pour la première fois, par Badius Ascensius, sous ce titre : Historia, ou de Gestis Francorum, un volume in-fol., dédié à Guillaume Parvi, confesseur du roi, Paris, 1514. Une seconde édition, moins incorrecte, fut donnée par J. Nicot, en 1507, Paris, 1 vol. in-8o. Jacques Du Breuil en publia une troisième en 1602 Le même ouvrage a été inséré par Fr. Duchesne dans le 3e vol. de sa collection des historiens de France, édition supérieure aux précédentes ; et par dom Bouquet à la tête de son recueil. On trouve, dans la Bibliothèque de Fleury, un éloge de St. Benoit par Aimoin ; c’est une compilation dans laquelle il a rassemblé tout ce qui avait été écrit à la louange de ce saint. Le disciple d’Abbon avait aussi composé un poème de 200 vers sur la translation du corps de St. Benoit du Mont-Cassin à Fleury, et une continuation de l’histoire des miracles du fondateur de son ordre. Ces trois derniers ouvrages ont été imprimés par Duchesne, dom Bouquet et Mabillon. Enfin, nous avons du même auteur une Vie d’Abbon, son maître, recueillie par Fleury, Duchesne et Mabillon. Cet écrit, dicté par une pieuse et tendre amitié, est sans contredit, le plus beau titre littéraire d’Aimoin. « On y a non-seulement, dit dom Rivet, une histoire exacte, bien ordonnée, dégagée d’épisodes, de lieux communs, de réflexions hors d’œuvre, mais on y trouve encore plusieurs pièces originales apportées en preuve ; et les faits particuliers y sont liés avec d’autres qui regardent l’histoire générale de l’Église, et celle de France en particulier[1]. » C. W-r.


AIMON. Voyez Aymon.


AIMONE. Voyez Aymone.


AINDJY-SOLIMAN, grand vizir, était de la Bosnie, et naquit chrétien. Il fut élevé dans la religion mahométane, et dans le palais des Kiuperlis, dont il était la créature. Son surnom d’Aindy. qui veut dire rusé, lui fut donné à cause de son adresse à tromper ses amis et ses ennemis, en paix comme en guerre. De grade en grade, il devint serasquier en 1685, et battit Jablonowski, grand général de la Po-

  1. Histoire littéraire, t. 7