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ALA

dans l’Inde. (Voy. Mohammed Gaïath-Eddyn et Mohammed Chehabeddyn.) A-t.


ALA-EDDYN, 8e prince de la dynastie des Seldjoucides d’Anatolie, fut tiré, en 611 de l’hégire (1219 de J.-C.), de la prison où son frère l’avait fait jeter, et placé sur le trône par les grands et le peuple. Ses guerres contre le sultan d’Égypte et contre les Khowaresmiens, la conquête de la Caramanie et le rétablissement des villes de Sivas et d’Iconium, l’ont placé au rang des princes les plus célèbres ; mais ses succès furent suivis de revers, et l’arrivée des Tatars humilia l’orgueil qui lui avait fait prendre le titre fastueux de roi du monde. Il mourut en 654 (1256), laissant un trône chancelant à son fils Kaikhosrou, dont lapuissance fut détruite par les Tatsrs. J-n.


ALA-EDDYN Ier, 29e empereur de l’Indoustan, et 2e de la dynastie des Khaldjides, Afghans d’origine, était neveu et gendre de son prédécesseur Fyrouz-Schah II. Nommé par ce monarque soubah de la province de Gurrah ou Karah, limitrophe du Dekhan, il repoussa les invasions des Indous, et traversant la Nerbouddat, l’an 692 de l’hégire (1292 de J.-C.), il envahit leur pays, dévasta leurs temples, détruisit leurs idoles et revint avec un si riche butin que l’empereur lui donna aussi le soubahdar d’Aoude. Ces succès faciles firent concevoir à Ala-Eddyn le projet de conquérir la péninsule ; mais l’exécution de ce dessein ne fut d’abord qu’un moyen de se soustraire à des contrariétés domestiques et de réussir dans une entreprise criminelle. En 1294, il part comme pour une partie de chasse, et tournant vers le midi, il cache sa marche, évite toute hostilité, feint de menacer Ellikhpour et attaque a l’improviste Déoghir, capitale des États de Ramdéo, le plus puissant rajah du Dekhan En semant la défiance parmi les autres rajahs, il les empêche de secourir Ramdéo, qui, pour se délivrer d’un si redoutable ennemi, lui offre une forte rançon ; mais à peine l’a-t-il payée, que son fils, fier de la supériorité des forces qu’il amène, livre bataille aux musulmans, malgré son père, et au mépris du traité : il essuie une déroute complète. Ala-Eddyn reparait devant Déoghir, la pille, la met à feu et à sang, et force Ramdéo, pour sauver la citadelle, son dernier asile, de donner 45,000 livres pesant d’or pur, 415 livres de perles, 50 livres de diamants et de pierres précieuses, argent, 4.000 pièces d’étoffes, et une foule d’autres objets qui prouvent quelle était dès cette époque l’opulence de l’Inde. Ala-Eddyn laissa garnison dans Ellikhpour, que le rajah lui avait aussi cédée, et revint dans son gouvernement après mille périls, chargé de ses riches dépouilles. Cependant Fyrouz-Schah, inquiet sur le sort de son neveu, s’était avancé vers Goualior, où il apprit le retour et les succès d’Ala-Eddyn. Au lieu de marcher en force contre cet ambitieux, pour déconcerter ses projets, il lui laissa le temps de les murir par ses intrigues. Dupe de sa tendresse pour ce perfide, trompé par les fausses apparences de son repentir, de son désespoir d’avoir entrepris sa dernière expédition sans l’aveu de son souverain, ébloui enfin par la part qu’il espérait avoir dans le riche butin qui en avait été le fruit, Fyrour pardonne à son gendre, et s’embarque sur le Gange pour aller au-devant de lui. L’hypocrite, qui depuis quelque temps était dans le Bengale, non pour y chercher un asile contre la colère de son oncle, comme il voulait le faire croire, mais pour y lever des troupes, vient l’attendre sur les bords du fleuve, devant Mannikpour, avec son armée. Il affecte des craintes ; et pour le rassurer, l’empereur, laissant en arrière sa nombreuse escorte, se met dans une chaloupe avec quelques serviteurs ; mais à peine a-t-il atteint le rivage, à peine a-t-il relevé, en l’embrassant, Ala-Eddyn qui s’était prosterné à ses pieds, qu’il est mis à mort à un signal donné par ce traitre (fin de l’année 1296). De deux fils que laissait Fyrouz-Schah, l’aîné était absent ; le second, Rokhn-Eddyn fut mis sur le mine par les intrigues de sa mère ; mais ce choix injuste forma deux factions à Dehly, dans un moment ou l’union y était le plus nécessaire. Ala-Eddyn entra sans résistance dans la capitale et y fit sanctionner son usurpation, selon l’usage, en donnant des places et de l’or aux ambitieux. Rokhn-Eddyn s’était réfugié avec sa mère et ses femmes à Moultan, auprès de son frère ; ils y furent bientôt assiégés et forcés de capituler. Leurs jours devaient être respectés ; mais ou leurs creva les yeux et ils périrent misérablement en prison. L’année suivante, 100,000 Mogols du Djagataï traversaient l’Indus et envahirent le Pendj-ab. Un frère d’Ala-Eddyn, les ayant rencontrés près de Lahor, remporta sur eux une victoire compléte : 12,000 restèrent sur le champ de bataille, et les prisonniers en plus grand nombre furent égorgés. En 1298, ce même, prince et le vizir d’Ala-Eddyn conquirent le Goudzerat jusqu’à Cambaye, mirent en fuite le rajah et s’emparèrent de ses trésors, de ses éléphants et de sa famille. Une nouvelle invasion des Mogols retarda. la conquête entière du Goudzerat. Ils furent vaincus par Djafar, un des généraux de l’Indoustan. Mais une troisième armée, beaucoup plus nombreuse, sous les ordres de Koutloukh, fils du kan de Djagatai, après avoir ravagé tout le pays depuis l’Indus jusqu’à la Djemnah, arriva devant Delhy, répandant partout l’épouvante. L’empereur rassemble toutes ses forces, et marcha contre eux en personne. Djafar, qui commandait son aile droite, avait presque décidé la victoire et poursuivait les fuyards, lorsque, enveloppé par divers corps de Mogols, il fut abandonné par le frère d’Ala-Eddyn, jaloux de son triomphe précèdent, et succomba. Repoussés sur les autres points, les Mogols évacuèrent l’Indoustan. Enivré de sa prospérité, Ala-Eddyn ambitionna la gloire d’être conquérant comme Alexandre et prophète comme Mahomet. Pour exécuter le premier projet, il avait de l’audace, des talents militaires ; aussi s’empressa-t-il de prendre le nom du héros grec (Eskander) et de le faire mettre sur ses monnaies. Mais sachant à peine lire, il lui était plus difficile de s’ériger en réformateur des lois et de la religion ; aussi les sages conseils du vieux chef de sa magistrature le déterminèrent à se borner au rôle de conquérant.