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ALA

reconnaître connaître comme l’auteur de la vie de St. Thomas de Canterbury dont on a publié des extraits dans le Quadrilogue que le père Lupus a placé à la tête des lettres du saint archevêque. Une partie des œuvres de maître Alain ont été recueillies et publiées par les soins de dom Ch. de Vich, un vol. in-fol, Anvers 1654, On attribue encore à maître Alain les ouvrages suivants, qui ne sont pas imprimés 1o Commentaire sur le Pentateuque, les prophètes, etc. 2o Super Sententias libri quatuor ; 3o Summa quot modis, vol Oraculum Scripture sacræ ; 4o de Vitiis et Virtutibus ; 5o de Intelligentiis, sive Memoriale rerum difficilius ; 6o Dictionarium theologicum ; 7o Paradoxæ de maximis generalibus ; 8o de Naturis quorumdum animalium 9o Sæculum Ecclesiæ 10o de Ratione metrotum et syllabarum ; 11o de Accusationibus, Inquisitionibus, et Demuntiantibus Aloni ; 12o un poëme de Triplici mundo ; 13o des lettres ; 14o enfin neuf livres de sentences dont Bathius a donné des extraits dans ses Adversaria. C. W-r.


ALAIN, évêque d’Auxerre, qu’il ne faut pas confondre, comme fait Oudin, avec maître Alain, son compatriote, naquit en Flandre au commencement du 12e siècle : Alanus Flondriensis, dit son biographe contemporain. On n’est pas certain qu’il fût de Lille ; l’inscription qui se lisait autrefois sur son tombeau portait seulement qu’il avait été élevé dans cette ville. Voué à Dieu dès sa naissance, il reçut l’instruction cléricale, entra, jeune encore, à Clairvaux. pour se placer sous la discipline de St. Bernard, qui lui fit donner l’abbaye de Larivour, à deux lieues de Troyes, en Champagne. Douze ans plus tard, en 1152, il devint évêque d’Auxerre : les comtes de Nevers et d’Auxerre, qui voulaient faire nommer une de leurs créatures, essayèrent vainement d’entraver son élection ; l’abbé de Clairvaux, son puissant protecteur, triompha de leur opposition et obtint, après quelques difficultés, la confirmation du roi, qu’on avait indisposé contre Alain. Pendant treize ans qu’il occupa le siége épiscopal, ce prélat se fit estimer par ses lumières et sa sagesse. Les limites de cet article nous interdisant d’entrer dans le détail de son administration, nous nous bornerons dire que Louis le Jeune et le pape Alexandre III, justes appréciateurs de son mérite, lui confièrent plusieurs fois des commissions importantes. Parvenu à un âge avancé, il se retira à Larivour, ou il mourut en 1182. Il nous reste de lui : 1o cinq Lettres adressées Louis le jeune, au sujet des contestations de l’évêque avec le comte de Nevers : elles offrent des informations intéressantes sur les lois, les coutumes et la procédure féodales ; 2o une Vie de St. Bernard, où les faits sont présentes avec plus d’exactitude, de précision et de méthode que dans les biographies qui l’avaient précédé. Les Lettres ont été imprimées par Duchesne, dans le tome 4 de son recueil des historiens de France. Quant à la Vie de St. Bernard, on la trouve dans les œuvres de ce grand docteur, t. 2 de l’édition de 1690, in-fol. C. W-r.


ALAMANNI (Louis), célèbre poëte italien, naquit à Florence, le 28 octobre 1495 ; sa famille était une des plus nobles et des plus distinguées de cette ville. Son père était fort attaché au parti des Médicis, et lui-même, après avoir fait d’excellents études dans l’université de Florence, jouit de la plus grands faveur auprès du cardinal Jules, qui gouvernait la république au nom du pape Léon X ; mais ayant éprouvé de sa part un trait de sévérité qu’il regarda comme injuste, il entra dans une conjuration qui se forma contre lui à la mort du pape. Elle fut découverts, et Alamanni forcé de s’enfuir à Venise, d’où il passe en France pour plus de sûreté, lorsque le cardinal Jules eut été élu pape sous le nom de Clément VII. Les revers que ce pontife éprouva, en 1527, ayant donné à Florence l’occasion de s’affranchir, Alamanni y retourna et fut envoyé à Gènes, pour y protéger les intérêts de sa patrie. Dans ces temps difficiles, il se fit remarquer par sa sagesse et son désintéressement ; mais, malgré ses efforts et ceux de son parti, la cause de le liberté succomba. Charles-Quint passa en passa en Italie, peu de temps après, pour terminer les affaires de Florence, et la soumettre entièrement au joug des Médicis. Après cette nouvelle révolution, Alamanni ; proscrit par le duc Alexandre, revint en France, où les bienfaits de François Ier le fixèrent. Il y compose le plus grand nombre de ses ouvrages. La roi avait pour lui tant d’estime, qu’il le choisit pour son ambassadeur auprès de Charles-quint en 1544, après la paix de Crespi. Alamanni avait précédemment adressé à François Ier un dialogue allégorique entre le coq et l’aigle, dans lequel le coq appelait l’aigle oiseau de proie qui porte deux becs pour dévorer davantage :

Aquila grifagna
Che per più divorar due becchi porta

Il ne croyait pas que cette pièce fût connue de l’empereur. Dans le discours d’apparat qu’il prononça devant lui à sa première audience, il commença plusieurs de ses périodes par le mot aquila. Charles-Quint, pour toute réponse, répéta tout haut ces vers : Aquila grifagna, etc. « Je parlais alors en poëte, répondit Alamanni sans se déconcerter ; maintenant, je parle en ambassadeur. J’étais indigné contre le duc Alexandre, gendre de V. M., qui m’avait chassé de ma patrie ; je suis maintenant libre de toute passion, et persuadé que V. M. n’autorise aucune injustice. » Cette réponse plut beaucoup à l’empereur ; et Alamanni en obtint tout ce qu’il était chargé de demander. Il ne fut pas moins en crédit sous Henri II, qui l’employa aussi dans plusieurs négociations. Suivant habituellement la cour, il était avec elle à Amboise, lorsqu’il fut attaqué d’une dyssenterie dont il mourut, le 18 avril 1556. Les principaux ouvrages qu’il a laissés sont : l’un recueil de poésies en 2 vol.[1], sous le titre

  1. Dans l’épître dédicatoire placée en tête de ce recueil. l’auteur rend ainsi compte des raisons qui l’ont décidé à faire usages des vers sciolti ou non rimés : « On me blâmera peut-être d’avoir employé des vers sans rime, contre l’usage des meilleurs poëtes de notre langue ; mais je répondrai que, dans des sujets qui demandent des interlocuteurs, comme l’églogue. la rime est tout à fait déplacée, puisqu’elle donne au dialogue une affectation ridicule… Dans les sujets plus élevés, la rime, qui tient plus de l’agréable et du tendre que du majestueux, arrondit les phrases, apporte une uniformité ennuyeuse, emprisonne, pour ainsi dire, la pensée, et nuit à la noblesse, à l’étendue et à la variété. »