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ALQ

(S. de Puffendorff), 1699, in-12. 4o  on lui attribue le Voyage de Galilée, publié par D. S. A., Paris, 1670, in-12. A. B-t.


ALQUIER (le baron Charles-Jean-Marie), né à Talmont, près des Sables-d’Olonne, le 13 octobre 1752, fit ses études chez les Oratoriens, et passa quelques mois dans leur congrégation avec le projet d’y rester ; mais ses idées changèrent bientôt. Il embrassa la carrière du barreau ; et avant la révolution il était à la Rochelle avocat du roi au présidial et procureur du roi au tribunal des trésoriers de France. Devenu maire de cette ville, il fut, en 1789, nommé député du tiers-état du pays d’Aunis aux états généraux. Il siégea au côté gauche de cette assemblée, et fit successivement partie du comité de la marine et des colonies, et de celui des rapports et des recherches. Ce fut au nom de ce dernier comité que, le 22 octobre 1789, il lut un rapport sur un mandement de l’évêque de Tréguier, accusé d’avoir excité à l’insurrection contre l’assemblée nationale, et qu’il conclut à des poursuites contre ce prélat pour crime de lèse-nation ; ce qui fut adopté. Dans le mois de mars suivant, une discussion fort vive s’étant élevée au sujet de la franchise accordée aux députés pour leurs correspondances, Alquier soutint avec chaleur que quelques-uns de ses collègues en abusaient pour faire circuler des libelles contre-révolutionnaires. Le 31 juillet, il fut élu secrétaire. Enfin, adoptant de plus en plus le système de la révolution, il parla avec beaucoup d’amertume sur ceux de ses collègues qui avaient témoigné dans la procédure du Châtelet contre les auteurs de la révolte des 5 et 6 octobre. Quelques troubles survenus à Tabago ayant ensuite donné lieu à un rapport (17 février 1791), Alquier mit autant de soin à défendre ceux qui avaient causé ces désordres qu’à accuser ceux qui s’étaient efforcés de les réprimer, notamment le gouverneur Jobal, qu’il fit rappeler. Dans d’autres rapports sur les troubles sanglants qu’avaient occasionnés à Nimes et à Uzès, entre les catholiques et les protestants, les premiers décrets de l’assemblée nationale, Alquier présenta constamment les catholiques comme les ennemis de la révolution et les auteurs de tout le mal ; il les accusa d’avoir pris la cocarde blanche, répandu des libelles séditieux, et fait nommer par des menaces et des intrigues une municipalité contre révolutionnaire ; enfin il demanda que cette municipalité fût cassée, et que le président et les commissaires d’une assemblée de catholiques, où l’on avait osé protester contre les décrets de l’assemblée nationale, fussent traduits devant la haute court d’Orléans ; ce qui fut décrété. Lors d’une autre révolte occasionnée à Douai par la cherté des grains, Alquier prétendit encore que ces désordres avaient été causés par le fanatisme ; et il proposa d’infliger des peines aux ecclésiastiques qui, soit par leurs discours, soit par leurs écrits, exciteraient le peuple à la révolte. Cette proposition excita de vives réclamations ; et Robespierre lui-même déclara que des discours ne devaient pas être l’objet d’une poursuite criminelle ; qu’il était surtout absurde de faire une loi contre les discours des ecclésiastiques. Cette partie du projet fut rejetée. À l’époque du départ du roi pour Montmédy, Alquier fut envoyé dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, avec le duc de Biron et Boullé ; et le rapport de ces commissaires, tout empreint de patriotisme, fut lu dans la séance du 28 juin 1791. Alquier termina ses travaux à l’assemblée constituante par un rapport sur les troubles de la ville d’Arles, dans lequel il proposa de blâmer des arrêtés inconstitutionnels du département et de l’assemblée électorale des Bouches-du-Rhône. La session finie, il fut appelé à la présidence du tribunal criminel de Seine-et-Oise. Il remplissait ces fonctions lorsque les prisonniers d’Orléans arrivèrent à Versailles. On sait quel sort les attendait dans cette ville ; Alquier fit peu d’efforts pour les y soustraire ; il dit que des ordres positifs du ministre de la justice, Danton, l’en empêchèrent ; et, si l’on en croit madame Roland, il était à St-Germain dans le moment où les victimes furent égorgées. Ce fut au milieu de ces horribles désordres que le même département de Seine-et-Oise l’élut pour son député à la convention nationale[1]. Un mois après son entrée dans cette assemblée, lorsque la ville de Lyon commençait à être agitée par les violences de Chalier (voy. ce nom ), il s’y rendit en qualité de commissaire avec Boissy d’Anglas et Vitet, et réussit pour un moment à rétablir le calme. Revenu à la convention, il y assista au procès de Louis XVI, et vota la mort de ce prince, mais à condition que l’exécution serait ajournée à la paix générale, où cette peine pourrait être commuée ; demandant toutefois qu’elle fut appliquée sur-le-champ en cas d’invasion de la part d’une armée étrangère ou de celle des ci-devant princes français émigrés. C’était évidemment la peur qui dictait un pareil vote ; et il est trop vrai que dans toute sa carrière politique, surtout à la convention nationale, Alquier sacrifia souvent à ce méprisable sentiment. Il devina de bonne heure les résultats que devait avoir dans cette assemblée l’exagération révolutionnaire, et il mit tous ses soins à se soustraire aux dangers qui devaient en être la suite. Ayant cru d’abord pouvoir se tenir caché au comité de sûreté générale, dont il fut un instant président, il réussit à s’éloigner de ce volcan par des missions qu’il se fit donner. Pendant tout le temps qu’il fut obligé d’assister aux séances, on ne le vit jamais assis à la même place. À deux heures, il siégeait au marais et riait avec Vergniaux et Barbaroux ; la trois heures, il était sur la montagne, donnant la main à Danton, causant avec St-Just et Robespierre, et n’applaudissant jamais que du pied. Il eut, après le 31 mai, une mission dans l’ouest pour la réquisition des chevaux[2] ;

  1. Il avait été recommandé en ces termes dans une brochure publiée par Dubois de Crancé, sous ce titre : le véritable portrait de nos législateurs, 1792, in-8o : « Ce député de la Rochelle est un des plus vigoureux athlètes que le patriotisme ait eus à opposer à l’aristocratie. Il a beaucoup de sens, d’esprit, et même un caractère très-prononcé… Alquier a perdu toute sa fortune à la révolution… Il est aujourd’hui sans état et sans fortune… Le seul moyen qu’ait le peuple de se conserver des amis, des défenseurs zélés, est de les récompenser quand il le peut : on ne vit pas de bénédictions… »
  2. Il prenait dans ses arrêtés le titre de représentant du peuple délégué près l’armée des côtes de Brest pour l’exécution de la loi du VI brumaire. Il avait fait graver une vignette avec cette légende : Gouvernement révolutionnaire, armée des côtes de Brest ; et sur un écusson surmonté d’un bonnet rouge, on lisait : La liberté ou la mort