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et militaires d’Abdel-Mélek. Il avait une instruction peu commune chez les princes de sa maison, et protégeait les savants. Fier de son rang et de son autorité, ce fut lui qui le premier défendit aux officiers de sa cour de s’entretenir longtemps avec le calife, de tenir des discours suivis en sa présence et de se familiariser avec lui. Il exclut du conseil les étrangers qui s’y étaient introduits, et les remplaça par des Arabes. On vante sa modération envers les chrétiens, à qui il laissa, dans Damas, une église qu’ils ne voulurent pas abandonner. Mais ces qualités furent ternies par une sordide avarice, qui lui fit donner le surnoms de Rachyk-el-Hedjarah, sueur de la pierre. Les premières années de son règne offrent quelques traits d’injustice et même de barbarie, et ce fut l’apologue suivant qui, dit-on, le fit changer de conduite. S’ennuyant un jour, il ordonna un de ses bouffons de lui faire quelque récit qui pût le dissiper. Ce bouffon lui fit ce conte : « Il y avait une chouette à Bassora et une autre à Moussoul. La chouette de Moussoul ayant demande à celle de Bassora sa fille en mariage pour son fils, la chouette de Bassora répondit qu’elle ne l’accorderait pas, à moins qu’on ne lui donnât cent maisons ruinées. La chouette de Moussoul répondit : Il me serait impossible de te satisfaire ; mais si, par le secours de Dieu, notre prince vit encore un an, je te promets de donner à mon fils ce que tu lui demandes. » Le calife saisit facilement le sens de cet apologue ; et depuis ce temps, dit un historien arabe, il écouta les plaintes des opprimés et rendit justice à tout le monde. Abdel-Mélek passe pour le premier souverain qui ait fait frapper de la monnaie arabe. Il transmit le califat à son fils Wélyd, qu’il avait reconnu pour son successeur, et nommé au gouvernement d’Égypte peu de temps avant sa mort. J-n.


ABDEL-MELEK Ier, fils de Nouhh, 5e prince de la dynastie des Samanides, monta sur le trône en 543 de l’hégire (954 de J.-C.), et mourut d’une chute de cheval, au bout de sept ans de règne, pendant lequel il eut toujours à combattre Rokn-Eddaulah, qu’il força enfin à la paix. Son équité, son énergie et l’art de bien gouverner l’ont distingué des autres princes de sa maison. J-n.


ABDEL-MELEK II, fils de Nouhh, 9e et avant dernier prince de la dynastie des Samanides, succéda, en 388 de l’hégire (998 de J.-C.) à son frère Mansour II. (Voy. ce nom.) Élevé sur le trône par la faction de Bektouroun et-de Faïc, il n’eut que l’ombre d’un pouvoir qui était dans les mains de ces deux rebelles. Cependant Mahmoud-Sebekteguy (voy. ce nom), voulant venger la maison des Samanides, envoya des députés vers Bektouroun et Faïc, pour leur reprocher leur conduite criminelle envers Abdel-Mélek, et les menacer de son ressentiment. Ils se retirèrent d’abord à Merou, et revinrent ensuite camper devant Mahmoud, espérant le séduire par leurs promesses. Le faible Abdel-Mélek les accompagnait partout et prêtait son nom à leurs démarches. Quoique Mahmoud fût convaincu de leur perfidie, il n’osa pas refuser la paix qu’ils lui proposèrent, craignant de trahir la fidélité qu’il devait aux Samanides. À peine fut-elle conclue, que l’arrière-garde de Mahmoud fut harcelée par les troupes d’Abdel-Mélek. Mahmoud, obligé de se défendre, marcha contre son ennemi et le mit en déroute. Abdel-Mélek fut assez heureux pour se réfugier à Bokhara avec Faïc. Mahmoud le laissa en repos ; et envoya seulement des corps de troupes à la poursuite de Bektouroun. Les ennemis d’Abdel-Mélek entretenaient depuis longtemps des intelligences avec Iiek-Kan, roi du Turkestan. Ils parvinrent à persuader à Abdel-Mélek d’appeler à son secours ce barbare, qui n’avait, selon eux, d’autre intention que de rendre à la maison des Samanides son ancienne splendeur. Abdel-Mélek, jeune et sans expérience, céda à leurs conseils, et implora le secours d’Iiek-Kan. Celui-ci s’avança en toute diligence, s’empara de Bokhara, fit conduire le trop crédule Abdel-Mélek dans une forteresse, et s’assit sur son trône, le 10 de dzoulcaadah, 589 de l’hégire (24 octobre 999). Le malheureux prince Samanide fut ainsi détrôné après un règne de 8 mois et 17 jours. Il mourut dans sa prison. Son frère Montaser lui succéda. J-n.


ABDEL-MOUMEN (Abou-Mahammed), second prince des Almohades, en Afrique (Al-Mowahhad ou unitaires), né l’an 493 de l’hégire (1101 J.-C.), était fils d’un potier de terre du village de Nadjereh, dans le royaume de Telemsen. Après avoir acquis de grandes connaissances dans l’histoire et le droit public, il s’attacha au célèbre Toumert (voy. ce nom), et unit sa fortune à celle de cet imposteur, qui, sous prétexte de ramener les peuples de la Mauritanie à la doctrine pure de Mahomet, se frayait un chemin au trône. La nouvelle secte fit des progrès rapides, et Toumert eut bientôt une armée d’ardents prosélytes, dont Abdel-Moumen devint à la fois le lieutenant et l’iman ou grand prêtre. Sa première expédition fut dirigée contre Tachefys, roi de Maroc, qui venait de prendre les armes pour arrêter les progrès des nouveaux sectaires. Toumert étant mort avant d’avoir pu achever la révolution qu’il avait commencée, ses principaux disciples résolurent de conférer son autorité à Abdel-Moumen ; mais comme il eût été dangereux d’annoncer subitement la mort de Toumert, on la tint cachée quelque temps. L’adroit Abdel-Moumen avait apprivoisé secrètement un perroquet qui savait répéter ces mots Gloire, puissance, au calife Abdel-Moumen, prince des croyants ! Les principaux Al-Mowahhad ou unitaires, convoqués pour l’élection d’un nouveau chef, proclamèrent, l’an 526 de l’hégire (1132 de J.-C.), Abdel-Moumen calife et Emyr-el-Moumenyn. Habile à manier les esprits et à s’emparer de la multitude, Abdel-Moumen traita le peuple avec douceur et diminua les impôts ; mais, dévoré d’ambition, et réunissant en sa personne le sacerdoce et l’empire, il conçut le projet d’étendre sa domination sur toute l’Afrique occidentale. La vie de cet homme extraordinaire ne présente plus qu’une suite non interrompue de batailles et de conquêtes. À peine avait-il 5,000 hommes sous ses ordres lorsqu’il sortit de Tynmal pour s’emparer de Tadia, qu’il livra au pillage. Les provinces de Durah, Tyghan, Fazaz et