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ANA

reçut la couronne des mains du patriarche, le 4 juin 713, sous le nom d’Anastase II. Le premier soin du nouvel empereur fut de punir les auteurs de l’attentat commis sur la personne de Phillippique. Les Patrices George Burgaphe et Théodore Myace, qui avaient fait crever les yeux à Bardanes, subirent le même supplice. Anastase les envoya en exil à Thessalonique. L’ordre que ce prince apporta dans les finances, son amour pour le travail et la justice, rétablissaient l’empire, fatigué d’une longue tyrannie, et pouvaient le retenir sur le penchant de sa ruine. Anastase était digne du trône, mais les Romains n’étaient plus dignes d’un tel empereur. Au commencement de l’année 716, une sédition éclate sur la flotte qu’il armait dans le port de Rhodes, pour s’opposer aux progrès des Sarrazins. Les mutins massacrent le patrice Jean, leur général, et forcent Théodore, receveur des deniers, à accepter le sceptre, et à marcher à leur tête vers Constantinople. Anastase, réfugié à Nicée, se flattait d’opposer des forces aux rebelles ; mais la prise de la capitale, et la défection de ses troupes lui firent perdre toute espérance. Revêtu de l’habit monastique, il se fit conduire à Théodose, qui lui laissa la vie. Suivant un usage introduit dans ce temps, le prince déposé fut ordonné prêtre, et relégué à Thessalonique. Anastase avait régné deux ans et demi. Ce prince, si prudent sur le trône, ne porta pas la même sagesse dans son exil ; il ne put oublier qu’il avait possédé l’empire, et ourdit une trame pour recouvrer sa grandeur passée. L’archevêque de Thessalonique favorisait ses desseins ; les Bulgares lui donnèrent un asile ; ses intelligences s’étendaient jusque dans le palais ; Nicétas Xilonite, maître de la milice ; Isoës, commandant des troupes de Mysie ; Théognote, premier secrétaire d’état, Nicétas Autrax, préfet de Constantinople, tous ses créatures, étaient prêts à remettre la couronne sur la tête de leur bienfaiteur. Léon III, l’Isaurien, qui avait renversé le faible Théodore, fut averti du complot, et fit décapiter les quatre patrices. Les Bulgares, intimidés par les menaces de Léon, et séduits par son or, livrèrent Anastase et l’archevêque ; amenés à Constantinople, tous deux eurent la tête tranchée, en 719. L-S-e.


ANASTASE, patriarche de Constantinople, était de la secte des iconoclastes. À force de bassesses et de fourberies, il obtint, de l’empereur Léon l’Isaurien d’être élevé sur le siége patriarcal ; il avait été longtemps syncelle, ou premier clerc du patriarche Germain, prélat vénérable, auquel il ne cessa de susciter des persécutions. Un jour qu’Anastase montait les degrés du palais à la suite du patriarche, il mit, par hasard, le pied sur la robe de Germain, « N’allez pas si vite, Anastase, lui dit-il, vous n’arriverez que trop tôt à l’hippodrome. » Ces mots furent regardés comme une prophétie, que l’événement justifia. Lorsqu’Anastase eut pris la place de Germain, dépouillé de sa dignité, le 7 janvier 730, il s’abandonna sans réserve aux excès des iconoclastes. L’avarice ayant porté l’empereur à s’emparer des trésors de l’Église, le complaisant prélat les livra tous, et seconda la tyrannie et les persécutions de ce prince. Léon étant mort, en 741, Anastase, dans la vue de conserver sa dignité, se prêta à tous les caprices du sanguinaire Constantin Copronyme. L’année suivante Artabase, curopalate, et beau-frère de l’empereur, se rendit maître de la capitale ; le patriarche, toujours soumis aux circonstances, et ingrat envers ses bienfaiteurs, osa monter dans la chaire sacrée, un crucifix, à la main, pour prêcher la rébellion. Le châtiment ne tarda pas à s’appesantir sur lui. Copronyme, devenu paisible possesseur de la couronne par la défaite et la punition d’Artabase, fit crever les yeux à Anastase. On le promena dans l’hippodrome, monté sur un âne, et le visage tourne vers la queue de cet animal. Il resta un jour entier dans cet état, exposé aux insultes de la populace ; mais, après ce traitement ignominieux, Constantin, désespérant de trouver un prêtre qui secondât ses fureurs, laissa Anastase, tout aveugle qu’il était, sur le siége patriarcal, où il continua de déshonorer son ministère. Enfin, en 753, une mort douloureuse en délivra l’Église et l’empire. L-S-e.


ANASTASE (le bibliothécaire), célèbre et savant écrivain du 9e siècle, fut abbé d’un monastère de la Vierge Marie, au delà du Tibre, à Rome, et bibliothécaire du Vatican. Il assista en 808 au 8e concile général à Constantinople, où Phptius fut condamné. Ses connaissances, et le talent qu’il avait de parler éloquemment les langues grecque et latine, y furent très-utiles aux légats. Il traduisit les actes du concile du grec en latin, ainsi que ceux du 7e, tenu dans le siècle précédent. La plupart des nombreux ouvrages qu’il a laissés sont des traductions qui sont regardées comme plus fidèles qu’élégantes. Son Historia ecclesiastica, sive chronographia tripartita, imprimée à Paris, avec les notes de Charles-Annibal Fraboti, à l’imprimerie royale, 1649, gr. in-fol., fait partie de l’Histoire byzantine. Ce qui lui a donné le plus de célébrité, c’est son Liber pontificalis, recueil des vies des papes, depuis St. Pierre jusqu’à Nicolas Ier : il fut imprimé, pour le première fois, à Mayence en 1602, in-4o, par les soins du jésuite Busée. Il en a paru deux éditions dans le dernier siècle, une en 4 vol. in-fol., donnée par François et Joseph Bianchini, 1718-1735 ; une en 3 vol. in-4o, commencée par l’abbé Vignoli en 1724, et terminée en 1755, uns parler de celle Muratori a insérée dans son grand recueil Script. rer. ital., vol. 3, p. 1, où elle est accompagné de dissertations savantes, écrites à différents époques, et par différents auteurs. Il en résulte qu’Anastase ne fut point proprement l’auteur, mais seulement le rédacteur de ces vies ; qu’il les tira des anciens catalogues des pontifes romains, des sectes des martyrs, et d’autres mémoires soigneusement conservés dans les archives de l’Église romaine ; qu’enfin, il n’a composé que les vies de quelques-uns des papes de son temps, sans qu’il soit même possible d’en déterminer avec précision le nombre, ni de reconnaître avec certitude celles qui sont en effet de lui, les auteurs de ces dissertations n’étant pas d’accord sur ce point. On prétend qu’il existe deux exemplaires du Liber pontificalis, de l’édition de 1602, en l’où trouve l’histoire de la papesse Jeanne.