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Du reste, les deux époux conservèrent toujours des rapports d’estime et de bienveillance, et jamais les maîtresses du duc n’eurent d’influence sur le gouvernement. Quoique souverain et possédant une fortuite immense, François vivait sans luxe, comme un simple particulier ; se promenant dans la ville en habit bourgeois, sans suite, il saluait tout le monde avec affabilité. Les pères et les mères montraient à leurs enfants le vieux père, le vieux seigneur, car c’est ainsi que l’appelaient ses sujets. M-a.


ANHALT-COETHEN (Frédéric-Ferdinand, duc d’), naquit à Pless, le 25 juin 1769, de Frédéric-Erdmann, duc d’Anhalt-Pless, et de Louise-Ferdinande de Stolberg-Werningerode. Il reçut une éducation toute militaire, et entra en 1786 dans l’armée prussienne, à laquelle il resta attaché jusqu’en 1818, époque où lui échut la souveraineté d’Anhalt-Coethen. Pendant ces trente-deux années, il servit la maison royale de Prusse avec un zèle et une fidélité qui ne se démentirent ni dans la bonne ni dans la mauvaise fortune. Il était en 1792 major d’un régiment d’infanterie. Les campagnes de 1793 et 1794 lui fournirent de fréquentes occasions de signaler sa bravoure ; à la bataille de Hochheim, il prit deux canons, et eut le bras gauche percé d’un coup de baïonnette ; aux affaires d’Alsheim et de Neustadt, il reçut des blessures graves, et dans le combat de Kirweiler, une balle lui traversa la hanche gauche. Cette dernière blessure, qui fut longtemps à guérir, obligea le prince à se servir de béquilles pendant deux ans. À peine rétabli, il se hâta de rejoindre son régiment, et il allait le suivre en Pologne, lorsque la paix de Bâle (1795) mit fin aux hostilités. En 1796, il devint par la mort de son père souverain d’Anhalt-Pless, et dès lors sa première pensée fut de chercher à rendre compatibles les obligations qu’il avait à remplir connue officier prussien, avec les devoirs que lui imposait sa qualité de prince régnant. Il atteignit ce but en échangeant sa place de major dans l’infanterie contre un pareil emploi dans un régiment de hussards qui était constamment en garnison dans la ville de Pless ; et de cette manière il put à la fois veiller à l’administration de sa principauté et se rendre utile à la Silésie où elle était enclavée. En 1803 il fut promu au grade de colonel, et, dans la même année, il épousa la jeune princesse Henrictte de Holstein-Beck, qu’une mort prématurée lui ravit trois mois après son mariage. Cette perte le plongea dans une mélancolie contre laquelle il ne vit d’autre remède qu’un long voyage. Il parcourut en 1805 la Pologne, la Moldavie et la Valachie ; mais dans ce dernier pays une de ses blessures se rouvrit et l’obligea à s’arrêter à Bucarest. C’est la qu’il reçut la nouvelle que la Prusse armait de nouveau (1805) contre la France, et aussitôt, oubliant ses souffrances, il s’empressa de retourner en Silésie. Quand il y arriva, Frédéric-Guillaume III avait déjà ratifié la convention de Vienne du 15 décembre, qui cependant n’empêcha pas une nouvelle rupture entre les deux puissances, en 1806. Le prince d’Anhalt prit part à la sanglante journée d’Iena, et aux combats de Soemerda et Magdebourg ; mais il évita le sort du corps d’armée du prince de Hohenlohe, en se frayant, le sabre à la main, un passage à travers les colonnes ennemies. Il parvint ainsi à se sauver avec ses hussards jusqu’à Stettin, où il passa l’Oder ; et là, rassemblant quelques débris de l’armée, il en forma un corps de 3,000 hommes qu’il conduisit en Poméranie et en Prusse. En récompense de cette courageuse conduite, le roi lui accorda le grade de major général et le nomma gouverneur du comté de Glatz. Dans ce nouveau poste, le duc d’Anhalt organisa un corps de troupes destiné à débloquer Breslau. La défaite qu’éprouva alors une de ses colonnes ne lui fit point abandonner son dessein, et il parvint, par d’habiles manœuvres, a s’approcher de la place. Son but aurait été atteint si la garnison eut fait la moindre sortie ; mais comme une telle coopération fut vainement attendue, et que les assiégeants reçurent beaucoup de renforts, il ne resta au prince d’autre ressource que de se retirer, par Schweidnitz, à Neisse. Voulant gagner du temps pour faire de nouvelles levées, il offrit aux Français de leur rendre la forteresse de Brieg, s’ils lui accordaient un armistice de trois mois ; mais pendant qu’on négociait, cette place capitula. Le prince porta alors son quartier général à Glatz, et se borna à la défense de cette forteresse. Cependant Schweidnitz venait de capituler, et la position de Wartha était enlevée d’assaut : rien ne s’opposait désormais au siége de Glatz. Le commandant essaya de se faire jour avec sa cavalerie ; mais il échoua dans cette tentative et fut oblige de se retirer, tout en combattant, en Bohême, où ses troupes furent désarmées par les Autrichiens. Le prince passa également la frontière, et, quelque temps après, il demanda et obtint son congé. La paix de Tilsitt (1807) ayant laissé la principauté de Pless au pouvoir des Français il ne voulut pas y résider, et s’établit à Vienne. En 1810, il vint à Paris, où il assista à la célébration du mariage de Napoléon avec Marie-Louise, ainsi qu’aux nombreuses fêtes qui furent données à cette occasion. Il fut témoin de l’incendie qui éclata au bal du prince de Schwarzenberg, et arracha, au péril de sa vie, plusieurs personnes du milieu des flammes. Revenu à Pless, il accepta en 1813 le commandement de la levée générale, et devint en 1814 chef du 22e régiment de landwehr. L’année suivante, il épousa en secondes noces la comtesse Julie de Brandembourg, et en même temps le roi de Prusse lui conféra la décoration de l’Aigle noir. À la mort du duc mineur Louis d’Anhalt-Coethen, en 1818, il lui succéda comme son plus proche agnat, et, en 1819, il fit son entrée solennelle à Coethen. Peu de temps avant cette époque, de graves contestations s’étaient élevées entre le gouvernement prussien et celui d’Anhalt-Coethen, de sorte que le duc Ferdinand se trouva tout à coup placé dans une position pour ainsi dire hostile vis-à-vis de la puissance pour laquelle depuis trente-deux ans il combattait avec tant de zèle. On sait que, par l’incorporation du duché de Saxe à la Prusse (1814), les possessions d’Anhalt furent tellement enclavées dans ce royaume qu’elles perdirent