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ARI

recevoir dans leur communion. Ce prélat courtisan, consulté par l’empereur Constantin, qui commençait à s’alarmer des troubles que causait la division entre Arius et Alexandre, voulut lui faire entendre qu’il ne s’agissait que d’une querelle particulière sur une question de mots, qui ne touchait point au fond de la religion ; que le plus grand mal venait de l’aversion de l’évêque Alexandre pour le prêtre Arius, et qu’il fallait employer l’autorité impériale pour imposer silence au premier ; mais les procédés séditieux se multipliant chaque jour à Alexandrie, Constantin chargea le célèbre Osius d’aller faire des informations sur les lieux : elles ne furent pas favorables à Arius, qui, plein de confiance dans le crédit de l’évêque de Nicomédie, son zélé protecteur, présenta à l’empereur une confession de foi captieuse, pour infirmer le rapport d’Osius ; mais ce prince jugea, d’après ce rapport, que le sujet de la dispute était assez important pour avoir besoin d’être sérieusement examiné dans un concile par tous les évêques de son empire. Ce fut ce qui produisit la convocation du célèbre concile de Nicée, en 325. Arius, appelé dans des conférences préliminaires, exposa sa doctrine sans détour, et la soutint avec impudence. Il comparut ensuite dans le concile, où elle fut examinée contradictoirement en présence de Constantin. Plusieurs formules de profession de foi y furent proposées. Arius rejeta toutes celles où la divinité de Jésus-Christ et la consubstantialité du Verbe étaient exprimées. N’ayant voulu, ni céder à l’autorité des Pères, ni se rendre à leurs pressantes sollicitations, il fut anathématisé par le concile, et exilé en Illyrie par l’empereur, avec les deux seuls évêques qui lui étaient restés attachés. Après trois ans d’exil, Constantin, gagné par un prêtre arien, qui était l’agent secret d’Eusèbe de Nicomédie, le rappela sur une confession de foi équivoque, où il semblait adhérer aux décisions du concile de Nicée, et le renvoya à Alexandrie pour y reprendre possession de son église ; mais le grand Athanase, successeur de St. Alexandre, qui connaissait la fourberie d’Arius, ne voulut jamais l’admettre. Il eut plus de succès dans les conciles de Tyr et de Jérusalem, ou les eusébiens, qui y dominaient, le reçurent sans difficulté a leur communion, et le recommandèrent à St. Athanase, qui connaissait trop bien ses ruses et celles de ses partisans pour se laisser prendre à une semblable recommandation. Arius, mandé à Constantinople pour rendre raison des troubles que sa présence excitait à Alexandrie, présenta à l’empereur une troisième confession de foi, rédigée avec tant d’artifice, que l’hérésie n’y paraissait point. Il protesta même, avec serment, de sa soumission au concile de Nicée. Le patriarche Alexandre fit de vains efforts pour détromper l’empereur. Il eut ordre de recevoir Arius. Les eusébiens menacèrent de l’introduire de force dans l’Église, si le patriarche entreprenait de s’y opposer : alors le saint vieillard, prosterné au pied de l’autel, fondant en larmes, le visage contre terre, adressa cette prière à Dieu : « Seigneur, si Arius doit être reçu dans l’Église, retirez votre serviteur de ce monde ; mais si vous avez encore pitié de votre troupeau, ne permettez pas que votre héritage soit livré à l’opprobre, ne souffrez pas qu’il soit souillé par la présence de l’hérésiarque. » Cependant les eusébiens s’avançaient en triomphe. Arius, à leur tête, haranguait le peuple qui le suivait en foule. Comme il s’approchait du temple, où on lui avait préparé une réception solennelle, il sentit tout à coup les douleurs d’une colique violente, qui lui déchirait les entrailles. Pressé par un besoin naturel, il alla dans un lieu retiré, et l’histoire rapporte que, lorsque étonné de ce qu’il ne paraissait plus, on alla le chercher, il fut trouvé mort dans une affreuse attitude, et ayant rendu ses entrailles. Ses sectateurs dirent qu’il avait été empoisonné, et les catholiques regardèrent cet événement, vraiment extraordinaire dans la circonstance, comme un effet miraculeux des prières d’Alexandre, et, pendant longtemps, ils n’approchèrent qu’avec horreur du lieu où il était arrivé, en 336. On peut consulter, sur les détails de l’histoire d’Arius, la vie qu’en a publiée à Venise, en 1746, le P. Travasi, théatin, auteur des Vies des hérésiarques des trois premiers siècles. L’Église ne fut point délivrée, par la mort de cet hérésiarque, des maux qu’il lui avait causés. Tant que les ariens furent unis entre eux, ils formèrent une secte dangereuse dans l’Église et une faction redoutable dans l’État, et ils firent éprouver aux catholiques des vexations de tout genre. Forcés, sous l’empire de Théodose le Grand, de se replier sur eux-mêmes, ils agitèrent entre eux diverses questions subtiles qui les divisèrent. Tous ces partis ne communiquèrent bientôt plus les uns avec les autres : ils se donnèrent des noms odieux, se rendirent ridicules, tombèrent dans le mépris, et s’éteignirent insensiblement, de sorte qu’au commencement du 5e siècle, les ariens n’avaient plus ni évêques, ni églises, et ne formaient plus corps dans l’empire. Cependant l’arianisme subsista encore parmi les Vandales, chez les Goths, qui le communiquèrent aux Bourguignons, et même chez les Francs, où il disparut insensiblement après la conversion de Clovis. Plusieurs siècles après, il ressuscite, du principe de la réforme qui soumet tous les dogmes de la religion à l’examen particulier. Capiton, Cellarius, Servet, guidés par ce principe, combattirent la consubstantialité du Verbe. L’arianisme se répandit en Allemagne, en Pologne, en Hollande, en Angleterre, à Genève, et forma une infinité de sectes dans ces différents pays. Parmi les noms illustres inscrits sur la liste des nouveaux ariens, on distingue les Locke, les Newton, les Clarke, les Whiston, les Leclerc, les Sandius, les Zuickerfi. Heureusement l’arianisme moderne, réduit à n’être qu’une erreur systématique, n’a point fait de fanatiques comme l’ancien : néanmoins ses progrès ont paru si alarmants pour la religion en Angleterre, qu’on y a fait, dans le dernier siècle, pour le combattre, une fondation semblable à celle que Boyle avait faite pour combattre l’athéisme. T-d.


ARKWRIGHT (sir Richard), célèbre manufacturier d’Angleterre. Né pauvre, il travailla d’abord chez un barbier, à Manchester ; et, avec ses épargnes, loua une cave, où il établit une boutique de barbier,