Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 2.djvu/387

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

therine de Médicis, qui ne faisait rien d’important sans avoir son avis, alla le consulter au chevet de son lit, le jour de la bataille de St-Denis. Il lui proposa des mesures utiles pour le bien de l’État, et mourut le lendemain.


AUBERGINE (Gabriel de l’), évêque d’Orléans, né le 26 janvier 1579, était fils de Guillaume de l’Aubespine, baron de Châteauneuf, conseiller d’État, et ambassadeur en Angleterre. Après la mort de Jean de l’Aubespine, son parent, évêque d’Orléans, il fut désigné pour lui succéder, n’ayant encore que vingt ans, et fut sacré à Rome, en 1604, par Clément VIII. L’apanage de sa famille était d’être employé dans les négociations. Il s’acquitta avec succès de celles qui lui furent confiées, ce qui ne l’empêchait pas de se livrer au gouvernement de son diocèse, qu’il édifia par ses vertus, ni à l’étude de l’antiquité ecclésiastique, pour laquelle il avait un goût particulier. Il donna, en 1625, un traité : de veteribus Ecclesiœ Ritibus in-4°, et ensuite un autre de l'Ancienne police de l'Église, sur l’administration de l’Eucharistie ; des notes sur les Canons de plusieurs conciles, insérées dans la collection de Labbe, sur Tertullien et sur Optat de Milève, que les derniers éditeurs de ces anciens écrivains ont placées au bas des pages. Tous ces ouvrages respirent une érudition choisie, une grande connaissance de l’antiquité, et plus de critique qu’on n’en avait communément alors. Ils répandent beaucoup de lumières sur l’administration des sacrements de la pénitence et de l’eucharistie, dans les premiers siècles de l’Église, matière obscure, qui avait besoin d’être éclaircie par un homme aussi habile. Ses observations ne sont pas toujours justes, mais elles sont ingénieuses et savantes.

Il donnait un peu trop aux conjectures, et concluait trop facilement de quelques passages particuliers, de quelques pratiques observées dans certaines églises, à un usage universel. Il se fondait quelquefois sur des ouvrages supposés, tels que ceux qu’on attribuait à St. Denys l’Aréopagite, sur les constitutions apostoliques, qu’il croyait plus anciennes qu'elles ne le sont ; du reste il écrivait bien en latin et en français. L’Aubespine, obligé, par le rang de son siége, de se trouver à l’assemblée des évêques de la province de Sens, en 1642, n’y signa qu’à regret la condamnation du fameux livre de Richer. La mort surprit ce savant prélat à Grenoble, le 15 août 1650, dans un voyage qu’il avait fait pour complimenter Louis XIII sur le rétablissement de sa santé.


AUBERGINE (Charles de l’), marquis de Châteauneuf, frère du précédent, abbé de Préaux, naquit à Paris en 1580. Henri IV lui confia, en 1609, une mission à Bruxelles et en Hollande. Louis XIII l’envoya en Allemagne en 1620, puis à Venise et en Angleterre en 1629 et en 1650. Il s’acquit beaucoup de réputation dans ces diverses ambassades, et fut fait, en 1650, gouverneur de Touraine et garde des sceaux. Pendant les deux années que dura son ministère, il se déshonora par la conduite qu’il tint dans le procés des maréchaux de Marillac et de Montmorenci. Au lieu de se récuser, en sa qualité d’ecclésiastique, il obtint un bref de Rome qui l’autorisait à présider les commissions ou ces deux illustres personnages furent condamnés. Le premier l’avait réfusé, attendu qu’ayant profité de la dépouille de son frère, il avait intérêt à le trouver coupable et à servir la passion de ceux qui l’avaient élevé. Il fut cependant un des juges qui opinèrent à la mort. Quant au dernier, Châteauneuf ayant été page du connétable de Montmorenci, on trouvait étrange gu’il osât présider au jugement du fils, après avoir été au service du père. Il était juste que celui qui avait été le vil instrument des vengeances de Richelieu en devint la victime dès qu’il voudrait cesser d’en être l’esclave. Les sceaux lui furent ôtés en 1655, et il resta enfermé au château d’Angoulême jusqu’après la mort de Louis XIII. La cause de cette disgrâce a toujours été un mystère. Richelieu, dans son testament, lui reproche un mauvais procédé. On suppose que ce mauvais procédé consistait dans des intrigues avec la duchesse de Chevreuse et le chevalier de Jars, pour supplanter le cardinal. Louis XIII, dans sa déclaration pour la régence, avait expressément recommandé de tenir Chateauneuf toujours éloigné ; ce qui n’empêcha pas Anne d’Autriche de le rappeler aussitôt après la mort du monarque, pour l’exiler encore au bout de deux ans, comme un des chefs du parti des importants. Chàteauneuf, ne pouvant vivre sans intriguer, se jeta dans le parti de la fronde. La régente lui rendit les sceaux en 1650. Il devint alors l’homme de la cour. Anne d’Autriche le sacrifia ensuite au ressentiment du prince de Condé, qui ne pouvait lui pardonner le jugement du duc de Montmorenci. Rappelé de nouveau au conseil par une autre intrigue, il fut encore obligé de céder à la hauteur de Mazarin, dont il avait ambitionné la place. Enfin le vieux courtisan mourut en 1655, chargé d’années et d’intrigues, dit madame de Motteville. Châteauneuf avait hérité des talents de sa famille pour les négociations et pour les affaires ministérielles ; mais son goût pour l’intrigue remplit sa vie d’agitations, ses galanteries déshonorèrent son état, et son orgueil lit dire qu’il avait plutôt les manières d’un grand vizir, que celles d’un ministre de la cour de France.

Madeleine de l’Aubespine, tante des deux précédents, épouse de Nicolas de Neufville, secrétaire d’État, avait fait, par son esprit et sa beauté, l’ornement de la cour sous Charles IX, Henri III et Henri IV. Les poëtes du temps, et entre autres Ronsard, célébrèrent ses charmes et ses talents. Elle avait même composé quelques pièces de vers et de prose. On lui attribue une traduction des Épîtres d’Ovide.


AUBETERRE (David Bouchard, vicomte d’), né à Genève, d’une famille illustre qui s’y était retirée après avoir embrassé la religion protestante, revint dans sa patrie, où il avait obtenu la restitution de ses biens, donnés au maréchal de St-André, fit profession de la religion catholique, et fut nommé gouverneur du Périgord par Hemi IV. Inquiété dans son gouvernement par Montpezat, un des généraux de la ligue, il l’attaqua en 1598, le délit, et se montra généreux en renvoyant les prisonniers ; il fit la même année le siège de la petite place de