Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 2.djvu/577

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l’année suivante, Lucien Bonaparte ayant été nommé membre du conseil des cinq-cents, sa famille vint avec lui s’établir à Paris. Élisa, dont l’éducation avait été soignée, qui d’ailleurs avait de l’esprit, de l’amabilité, le goût des lettres et des arts, rassembla autour d’elle une société d’élite. Elle se forma une véritable cour composée des gens de lettres, des artistes les plus distingués de l’époque, et qui devint plus nombreuse et plus brillante, à mesure que s’éleva le pouvoir de Napoléon : Laharpe, Boufflers, Fontanes, y furent assidus. Ce dernier surtout était l’objet particulier des préférences de la princesse ; et l’on peut dire aujourd’hui, sans réticence et sans mystère, qu’il fut considéré comme son amant, et que c’est principalement à l’active protection de cette dame qu’il dut son élévation. L’abbé Delille lui-même, que Napoléon désirait connaître, se laissa conduire un jour chez madame Baciocchi ; mais il ne chercha point à plaire, et n’y retourna pas. Par un décret du 27 ventôse an 13 (18 mars 1805), Napoléon, devenu empereur, céda en toute propriété, à sa sœur Élisa et à son époux, la principauté de Piombino, à laquelle très-peu de temps après il ajouta celle de Lucques. Les nouveaux souverains partirent aussitôt pour leur résidence, et ils y furent couronnés le 10 juillet 1806. On peut dire que ce fut là le seul acte administratif auquel la grande-duchesse voulut bien associer son époux. Pour tout le reste, Baciocchi ne fut notoirement que le premier des serviteurs de sa femme, qui ne parait avoir eu, dans sa conduite publique et le gouvernement de l’État qui venait de lui échoir, d’autre plan et d’autres vues qu’une imitation servile et quelquefois ridicule de la conduite de son frère Napoléon sur un plus grand théâtre. Les lettres qu’elle avait paru chérir en France furent, en Toscane, négligées pour les armes ; la grande-duchesse n’était guère entourée que de soldats, ne rêvait que parades et que campagnes, consumait son temps dans des fêtes et des intrigues de sérail, pendant que les soins de l’administration étaient abandonnés à des hommes qui avaient su s’emparer de sa confiance et qui souvent en abusaient. Elle a cependant attaché son nom à quelques établissements utiles, à quelques grands monuments, au premier rang desquels on cite la route magnifique qu’elle a fait construire de Lucques aux bains de la Villa. Tout cela donnait sans doute à son administration un air de noblesse et de grandeur. Mais hautaine, fastueuse, elle s’est placée souvent au-dessus des convenances, et a semblé mettre sa gloire à les braver. Son époux ne paraissait jamais que derrière elle, dans les fréquentes et somptueuses cérémonies où son orgueil se complaisait ; elle passait des revues où il l’accompagnait pour jouer le rôle modeste d’aide de camp ; sur les monnaies il ne figurait qu’en seconde ligne, et son effigie y était cachée à moitié par celle de la princesse. Au milieu d’une foule de favoris qui gouvernaient en son nom, Elisa se livrait à des profusions excessives, et dilapidait les trésors de l’État. Un flatteur l’appela dans ses vers la Sémiramis de Lucques. Ce surnom, qui flatta sa vanité, peut pa

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raître aujourd’hui la satire la plus sévère qu’on ait faite de sa conduite. Elle fut nommée, en 1808, grande-duchesse ayant le gouvernement de Toscane ; mais ce titre, qui ne fut conféré qu’à Élisa, n’appartint jamais à son mari. Dès lors elle tint sa cour à Florence, à Pise, à Poggio, à Cajano. A toutes ces pompes, à toutes ces fêtes, succédèrent les revers ; après la chute de Napoléon, en 1814, la princesse Elisa, retirée d’abord à Bologne, et ne s’y trouvant pas en sûreté, voulut se réfugier à Naples ; Murât, qui était alors l’allié des Autrichiens, refusa de l’y recevoir. Au commencement de 1815, elle alla chercher un asile à Trieste ; depuis elle se réunit à sa sœur Caroline, veuve du roi Murat, dans le château de Haimbourg, près de Vienne, puis dans celui de Brunn en Moravie. Enlin elle se fixa, sous le nom de comtesse de Compiguano, à Bologne, où elle est morte d’une fièvre nerveuse, dans les premiers jours d’août 1820. Ses restes embaumés ont été transportés à Trieste. — Son fils (Frédéric) mourut à Borne, dans le mois d’avril 1833, à l’âge de 18 ans, par suite d’une chute de cheval. — Son époux, Félix Baciocchi, fut ensuite prince romain jouissant de 100,000 écus de rente. Il est mort à Bologne, le 28 avril 1841. — Leur fille, la comtesse Elisa-Napoléon, est mariée au prince Camerata. — Le portrait de madame Élisa Baciocchi, peint par Gérard, est gravé dans la collection des portraits historiques de cet artiste.

F-ll.



BACK (Abraham). Voyez Bjeck.


BACKER. Plusieurs peintres de l’école des Pays-Bas ont porté ce nom. Jacques DE BACKER, le plus ancien, naquit, en 1530, à Anvers, d’un peintre qui alla en France, où il mourut. Son fils, se trouvant dans une situation pénible, fut obligé de travailler pour un marchand de tableaux, qui le surchargea d’ouvrage, et qui, vendant très-bien tout ce qui sortait du pinceau de Backer, lui disait sans cesse qu’il ne pouvait s’en défaire. Backer le quitta enfin, mais trop tard : l’excès du travail avait anéanti ses forces. Il mourut en 1560, âgé seulement de 30 ans. On vante le bon goût de cet artiste pour la disposition des sujets, et son talent pour accorder les fonds avec les figures. On le regarde aussi comme un des bons coloristes d’une école où cette partie de l’art a été portée à un haut degré de perfection.

— BACKER, nommé aussi Jacques, naquit à Harlengen, en 1608 ou 1609. Il s’adonna surtout aux portraits, qu’il peignait avec beaucoup de facilité ; il dessinait très-bien les académies, surtout les corps de femmes, et fit des tableaux d’histoire, dont quelques-uns ont été célébrés par le poète Vondel. On cite surtout un Jugement dernier, fait pour l’église des Carmes d’Anvers. Cet artiste mourut à Amsterdam, le 27 août 1641.

Adrien BACKER, neveu du précédent, naquit à Amsterdam, en 1643. Le bon goût de dessin de ses figures porte à croire qu’il étudia en Italie. Son ouvrage le plus considérable est un Jugement dernier, fait pour l’hôtel de ville d’Amsterdam. Il mourut dans cette ville, en 1686.

— Enfin, un autre BACKER, né à Anvers en 1648, travailla en Angleterre, sous la direction et à la pension de Kneller ; on assure que