Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 20.djvu/376

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que la traduction de Marillac ou à peu près, quelques corrections faites à cette traduction, l’une des plus célèbres dans son temps, ont-elles pu faire citer par un grammairien critique contemporain la prétendue version de R. C. A. comme une traduction nouvelle ? G—ce.


IRWIN (Eyles), poëte anglais, né à Calcutta en 175f, avait pour père un employé de la compagnie des Indes. Il fit ses études en Angleterre à Chiswick, et à l’âge de seize ans, entra comme aspirant au service de la compagnie. Bientôt la puissante protection de lord Pigot le fit placer à Madras. Il y resta jusqu’à l’insurrection qui renversa momentanément ce gouverneur. Suspendu de ses fonctions par les usurpateurs, il prit soudain la résolution d’en référer à la cour des directeurs à Leadenhall-Street, ou plutôt il fut choisi par les adhérents de lord Pigot, pour aller porter à Londres leurs dépeches secrètes, et pour donner verbalement les explications relatives aux derniers événements. lrwin s’y prit mal pour exécuter rapidement sa mission : au lieu d’adopter la route usuelle par le cap de Bonne-Espérance est ’Atlantique, il trouva plus neuf et plus court à la fois de se rendre par la mer Rouge à Suez, d’où il se transporterait par terre aux rives du Nil, évitant ainsi la longue circumnavigation de l’Afrique (1777). Ce plan poétique fut loin de se réaliser. Il fallut au vaisseau qui Pemmenait avec plusieurs de ses compatriotes huit ennuyeuses semaines pour atteindre lloka. À Yambo, où ils relâchèrent ensuite, et dont jamais encore le port n’avait reçu de navire européen, ils furent traités avec la dernière inhumanité par le vice-gérant du chérif de la Mecque, lequel, après les avoir invités à descendre à terre, les mit en prison dans une tour, les menaça de leur faire trancher la téte, et ne rendit la liberté à quelques-uns d’entre eux que moyennant de riches présents au chérif et à son chiaou. A Cosséir, où un vaisseau turc, chèrement frété par eux, les débarqua au bout de plus d’un mois, au lieu de les rendre à Suez, comme le portait la convention, ils subirent encore une foule d’avanies et de vols de détail. Mais tout cela ne fut rien en comparaison de ce qui les attendait à Ghinnach, où ils arrivèrent avec la caravane,.et où ils furent retenus six semaines jusqu’à l’arrivée du grand cheik des Arabes, Isman Abou-Ali. Ce dernier se hata de mettre un terme aux vexations sans fin dont ils étaient l’objet, et enfin ils purent se rendre au Casse sans autre encombre que la rencontre d’une troupe de brigands qui venait de parler une caravane, mais qui offrit de leur servir de guide et d’escorte dans le désert. On accepta et l’on s’en trouva bien. En arrivant dans le Delta, lrwin apprit que lord Pigot allait être réintégré dans sa place, et que les dépêches qui contenaient l’ordre de sa réinstallation étaient déjà en route, tant les mésaventures dont on vient de voir le tableau l’avaient retardé. Bien que son voyage n’eùt plus désormais le gouverneur pour objet, il se remit en route pour Londres ; un navire français le descendit à Marseille, d’où peu de jours lui suffirent pour atteindre la Manche, puis la capitale de l’Angleterre : son voyage avait été de onze mois. L’année suivante (1778), il épousa miss Brooke, parente du poète irlandais Brooke, que sa tragédie de Gustave Ilara et son poëme ordactique de la Beauté suive : - : elle eut rendu célèbre. Relevé bientôt après de sa suspension par la cour des directeurs et rendu au service de la compagnie ; il se dirigea de nouveau vers l’Inde, et cette fois, grâce à l’expérience qu’il avait si chèrement acquise, il fit heureusement et rapidement la traversée. fais il ne trouva pas l’Inde comme il l’avait laissée. L’existence nreme de la compagnie était menacée par la flotte française que commandait le bailli de Suffren et par les troupes de Haider-Ali, qui, maître du Carnasse, poussait des partis jusqu’aux murs du fort St-Georges. Dans cette crise, lrwin servit essentiellement la compagnie. Chargé de plusieurs missions délicates, tant auprès des radjahs hindous qu’auprès des chefs mabrasses, il les remplit avec succès et y déploya, outre la connaissance approfondie. de l’esprit des cours de l’Inde, une intégrité rare à cette époque et si près de la ligne. il s’acquit ainsi lestime de lord Macartney, qui le nomma membre de la commission pour l’administration du territoire et des revenus du Caruatic, et qui, de plus en plus charmé de ses qualités, lui confia la surintendance et l’administration des provinces de Tinnivelly et de Madurah. Dans ce poste important et honorable, mais difficile, il était indispensable de se concilier les chefs pgrégars du voisinage, sans le bon plaisir desquels il n’eùt pas été possible de faire fleurir la paix et la sécurité dans ces régions, et d’y lever des impôts en argent ou en nature. lrwin se mit sur-le-champ en rapport avec ces bandits, qui jusqu’alors avaient eu pour habitude de descendre dans la plaine pour parler, et qui, depuis la chute du nabab et la cession du pays à l’Angleterre, étaient aidés dans leurs déprédations parla secrète connivence des habitants, moins spoliés peut-être par les Pgrégars que par les agents de la compagnie. Telle fut l’habileté avec laquelle il conduisit les négociations qu’ifs cessèrent presque instantanément leurs brigandages, et que beaucoup d’entre eux se mirent à la solde de la compagnie. Il faut dire aussi qu’lrwin avait débuté par organiser dans les deux provinces une force militaire respectable qui appuyait vigoureusement ses négociations et ses offres, et que, réprimant sévèrement les exactions et les violences en usage sous ses prédécesseurs, il avait intéressé la population paisible au matation de l’ordre de choses nouveau. Les coffres de la compagnie s’en trouvaient bien, puisque en moins de deux ans ils reçurent moitié de ce que le nabab avait perçu pendant dix-huit ans ; ses soldats, presque superflus contre les Pgrégars, devenaient disponibles pour d’autres expéditions ; sa domina-