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l’influence des théâtres, qu’il voulait faire servir à la régénération des mœurs et de l’esprit républicain. L’époque des nouvelles élections approchait ; Lamarque essaya vainement de seconder le parti qu’on désignait alors sous le nom d’anarchique. dénonça le 1er mai un libelle contre les élections de la Dordogne ; mais, malgré ses soins, le directoire, qu’il avait servi avec tant de chaleur, se montra peu reconnaissant ; il vint à bout de faire annuler les élections qui ne lui convenaient pas. Lamarque, bien qu’il eût été nommé dans deux départements, bien qu’on rappelât en sa faveur sa présidence au 18 fructidor, fut du nombre des exclus. On le vit alors donner son adhésion au coup d’État, qui suspendait, selon lui, les droits du peuple, « parce que, dit-il, la résistance serait inutile, et que l’adhésion pouvait « avoir son utilité. » Et en effet, pour récompense de cette soumission, le directoire le nomma dans le même mois ambassadeur à la cour de Stockholm ; mais le roi de Suède, qui n’avait pas les mêmes raisons de le dédommager, et qui ne voulait pas se trouver en présence d’un régicide, lui fit signifier de ne pas mettre le pied dans ses États. Ainsi éconduit, l’ambassadeur s’en revint doucement à Paris, de Hambourg, où il s’était rendu. Réélu au conseil des cinq-cents l’année suivante, on lui permit cette fois d’y entrer, et il fut nommé secrétaire le 20 août. Le triomphe momentané des jacobins, à cette époque, ayant amené de nouveaux projets d’amnistie, Lamarque eut encore occasion de réclamer, mais toujours sans succès, en faveur de Barère. Il vota la suppression du mot haine à l’anarchie dans le serment civique, parce qu’il pensait que c’était pour calomnier la liberté qu’on l’y avait inséré, fit l’éloge du général Joubert, tué à Novi, et le proposa pour modèle aux défenseurs de la patrie. Le 15 août 1799 (28 thermidor an 7), il fit partie d’une commission de sept membres nommés par le conseil des cinq-cents, pour lui présenter des mesures de salut public (les autres membres étaient Chénier, Daunou, Lucien Bonaparte, Eschasseriaux ainé, Boulay de la Meurthe et Berlier). Lamarque se prononça dans le même temps contre la licence de la presse, appuya la motion du général Jourdan lorsque celui-ci voulut faire déclarer la patrie en danger, examina s’il était nécessaire d’imprimer une force extraordinaire à la marche constitutionnelle, et si, au lieu de conserver le caractère ministériel et secret, cette force ne devait pas recevoir un caractère national et public. Il vota pour l’affirmative, et rappela l’époque de 1792, où cette déclaration des dangers de la patrie avait, selon lui, produit les plus grands avantages. Il nia cependant qu’en cette circonstance l’assemblée législative eût voulu amener le renversement de la constitution royale, qu’elle avait fait serment de défendre, ce qui fut démenti par Poultier. Lamarque termina son discours par ces mots : « La liberté ou la mort ! » Le conseil répéta ce cri, mais ne déclara point la patrie en danger. Cette résistance paralysa toutes les manœuvres du parti jacobin, qui rentra dans une espèce d’inaction, et donna le temps à ses ennemis de préparer le 18 brumaire. Lamarque ne fut pas formellement exclu du corps législatif à cette époque ; seulement, il n’y entra point à sa recomposition ; et, en mars 1800, il fut appelé aux fonctions de préfet du département du Tarn ; puis, en 1804, nommé substitut du procureur général au tribunal de cassation, qui était alors Merlin (de Douai) ; ce qui fit dire aux mauvais plaisants qu’on avait mis à celui-ci la marque sur le dos. Il y siégea jusqu’en février 1815, ne fut pas compris dans la nouvelle organisation de cette cour ordonnée par le roi, et y fut rétabli par ordre de Bonaparte après le 20 mars 1815. À l’époque du champ de mai, il présida les collèges électoraux de la Dordogne, et harangua Napoléon en cette qualité. Compris dans la loi contre les régicides, en 1816, Lamarque se réfugia à Genève, où il obtint l’autorisation de résider, et passa de là en Autriche. Revenu en France en 1819 par la faveur du ministre Decazes, il se retira à Montpont, dans la Dordogne, où il demeura paisiblement, et mourut au mois d’août 1839.


LAMARQUE (Maximilien), général français, naquit à St-Sever, le 22 juillet 1770, fils unique d’une famille fort honorable. Son père, procureur du roi à la sénéchaussée de cette ville, député de sa province aux états généraux de 1789, y fut si peu remarqué qu’on n’en trouve pas la moindre trace dans les journaux ni les mémoires du temps. Le jeune Maximilien venait d’achever de très-bonnes études, lorsque la révolution éclata ; il en embrassa la cause avec ardeur, et s’enrôla dès le commencement dans un bataillon de volontaires du département des Landes, qui fut employé sur la frontière d’Espagne. Devenu capitaine de grenadiers dans la première campagne, il commanda une compagnie de cette brave troupe qu’on appelait la colonne infernale, son ; les ordres du premier grenadier de France, la Tour d’Auvergne. Il trouva là de nombreuses occasions de se distinguer, notamment à l’attaque de Fontarabie, dont il s’empara, à la tête de deux cents hommes, après avoir passé la Bidassoa sous un feu meurtrier, et qui lui enleva plus de la moitié de ses soldats. Avec le reste il fit dix-huit cents prisonniers et s’empara de quatre-vingts pièces de canon. Cet exploit eut un grand retentissement ; le jeune capitaine fut nommé adjudant général, et chargé de porter les drapeaux pris sur l’ennemi à la convention nationale, qui, par un décret spécial, déclara qu’il avait bien mérité de la patrie. Lorsque la paix fut conclue avec l’Espagne, Lamarque passa à l’armée du Rhin, où il servit sous les ordres de Moreau et de Dessolles, qui était son compatriote et son ami. Nommé général de brigade en 1801,