traités qu’il a publiés. La Crédibilité de l’histoire évangélique renferme beaucoup d’érudition et de critique. L’ouvrage du P. de Colonia, jésuite, et celui de Bullet sur le même sujet, ne sont pas sans mérite ; mais ils n’approchent pas de celui de Lardner pour la profondeur du raisonnement et pour le nombre des preuves. Depuis longtemps les amis de la religion ne cessent de se plaindre qu’il ne soit pas traduit en français, malgré la teinte de socinianisme qu’on peut lui reprocher. Lardner passa presque toute sa vie dans un état voisin de la pauvreté. Quand il se sentit près de sa fin, il se fit transporter à Hawkherst, sa patrie, où il mourut le 24 juillet 1768. Outre les ouvrages dont nous avons parlé, on a encore de lui : 1° A Letter, etc., upon the personnality of the spirit, 1776. Le docteur Lardner l’avait écrite en 1762. 2° The History of the heretics of the two first centuries after Christ, 1780. Cette histoire des hérésies des deux premiers siècles, ouvrage posthume publié par Hogg d’Exeter, ne répond pas à la réputation de l’auteur. 5° Quarante et un Sermons ; 4° Two schemes, etc. (Deux tableaux de la Trinité, etc.). Cet ouvrage consiste en quatre discours que l’on peut regarder comme un supplément à l’ouvrage que Lardner écrivit dans sa jeunesse, et qu’il publia en 1759 sans nom d’auteur, sous ce titre : A Letter concerning the question, Whether the logos supplied the place of the human soul in the person of Jesus-Christ. C’est là que le docteur anglais a consigné ses opinions sociniennes ; il refuse nettement la divinité à Jésus-Christ, et ne le regarde que comme un homme privilégié, élevé au-dessus des autres hommes par une faveur spéciale de l’Être éternel, et par la commission dont il a été honoré. 5° Trois Discours pour faire voir que l’état présent des juifs en une preuve de la vérité de la religion, 1745 ; 6° Essai sur le récit de Moïse touchant la création et la chute de 1’homme,1755 ; 7° Sur les démoniaques du Nouveau Testament. Le docteur prétend qu’ils n’étaient que des maniaques. On voit d’après cela que Lardner était très-savant, mais hardi dans sa critique, et paradoxal. Tous ses ouvrages ont été, en 1788, recueillis en onze volumes in-8" par le docteur Kippis, qui a mis à la tête du premier une Vie de l’auteur. Une édition plus belle et plus complète a paru en 5 volumes in-4°, Londres, 1815. L-b-e.
LAREVELLIÈRE-LÉPEAUX (Louis-Marie), naquit,
le 25 août 1755, à Montaigu, petite ville du
bas Poitou (département de la Vendée), d’une
famille originaire des parties voisines du bas Anjou.
Son père, homme de mérite et d’un caractère
honorable, était juge au siège des traités de
Montaigu, et fut maire de cette bourgade presque
toute sa vie. Il eut trois enfants, et malgré une
fortune des plus médiocres, il fit donner à ses
deux fils une éducation aussi complète que possible
pour le temps et le pays où il vivait. Larevellière,
le plus jeune des deux, contrastait par son apparence débile avec la santé et la vigueur de la famille ; mais, grâce aux soins dont il fut entouré et à l’heureuse sévérité de son éducation physique, il gagna en quelques années une force de résistance qui semblait lui avoir été refusée en
naissant. Un prêtre fut, selon l’usage d’alors
chargé de lui enseigner les premiers éléments du
latin ; cet homme, d’un extérieur doucereux,
mais d’un caractère violent et brutal, fit endurer
à son élève toutes sortes de mauvais traitements,
révélés trop tard à la famille par leurs fâcheuses
conséquences. L’enfant, qui avait alors neuf ou
dix ans, fut affecté d’une déviation de l’épine
dorsale, qu’on ne savait pas encore combattre
par des moyens appropriés, et resta contrefait.
Ses études, un moment entravées, furent reprises
avec succès au collége de Beaupréau,
en Anjou, et terminées dans celui des oratoriens
d’Angers. Muni de son diplôme de licencié en
droit, il fut envoyé à Paris, avec son frère ainé,
pour y suivre, ainsi que ce dernier, la carrière de
la jurisprudence. Dès son arrivée, il fut reçu avocat
au parlement et admis chez un procureur
nommé Potel, qui devait l’initier aux détails de
la procédure. L’esprit éminemment littéraire et
philosophique du jeune avocat le rendait peu
propre a ce travail aride, pour lequel il ressentait
d’ailleurs une invincible répugnance. Un
goût impérieux l’entraînait vers les études spéculatives ;
l’indulgence de Potel, en lui créant des
loisirs, et le dévouement de Larevelliêre ainé,
qui, comme maître clerc, savait gagner pour
deux, lui fournirent les moyens de le satisfaire.
Au bout de quelques années, les deux frères regagnèrent
leur province. L’ainé devint conseiller
au présidial d’Angers et se maria. Le cadet, resté
sans profession, lit la connaissance de mademoiselle
Boyleau, sœur d’un de ses amis et d’une
assez riche famille bourgeoise de l’Anjou, habitant
la terre de Chandoiseau, près Thouarcé. Cette
demoiselle, d’un esprit très-distingué et d’une
instruction solide, qu’elle était parvenue à acquérir
en dépit de tous les obstacles, était faite pour
apprécier l’intelligence supérieure et le caractère
élevé du jeune avocat. Leur union fut bientôt
décidée et réalisa pour tous deux un complet
bonheur domestique. Mademoiselle Boyleau avait
fait partager à Larevellière sa passion pour la botanique.
Mais, quoi qu’on en ait pu dire, jamais
plus tard elle n’eut aucune influence sur ses déterminations
politiques, dont il puisa toujours les
mobiles dans son amour pour la liberté et sa
conscience pure et inflexible, sans recourir aux
inspirations d’une nouvelle Égérie. Il vécut d’abord
à Nantes, où naquit sa fille ainée, puis en
Anjou, dans le petit village de Faye, où son
temps se partageait entre l’étude de la botanique
et les sciences philosophiques et sociales. En philosophie,
J. J. trousseau était son auteur de prédilection,
et la profession de foi du vicaire savoyard
formulerait assez exactement ses propres
idées ; en politique, un penchant décidé l’entraî-