Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 38.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


164 SAX

de la terre, mais plutôt d’une unité qui sera le résultat et l’effet de ces variétés mêmes et de cet antagonisme dans les qualités nationales. » C’est ainsi que, tout en se tenant dans les limites constitutionnelles, le prince Albert sut tirer parti du titre de prince-époux qu’il reçut légalement en 1857, bien qu’il le fût effectivement depuis son mariage. Les sciences ne l’intéressaient pas moins vivement que la politique et les beaux arts. Ce fut lui qui présida en 1856 le quatrième congrès de statistique internationale réuni alors à Bruxelles. Il y exprima le désir de voir les peuples adopter un système uniforme de poids, de mesures et de monnaies. Il ne fut pas donné à ce prince de présider, comme il l’espérait, l’exposition universelle de 1862 ; un froid subit dont il fut saisi, en allant voir à Cambridge son fils le prince de Galles, fut l’avant-coureur de sa fin prématurée. Il ne se fit pas illusion sur son état, fit venir la princesse Alice sa fille pour lui recommander de veiller sur sa mère, après quoi il mourut. C’était le 14 décembre 1861. L’Angleterre tout entière s’associa au deuil de la reine. Le prince Albert avait été feld-maréchal, conseiller privé, colonel du 11° de hussards et des grenadiers de la garde, chancelier de l’université de Cambridge, enfin chevalier de la Jarretière. Ce qui lui fit plus d’honneur que tous ces titres, c’est que, tout en menant une vie active et utile, il accepta sans arrière-pensée les exigences constitutionnelles d’une position si voisine du trône. et dans laquelle il sut se renfermer jusqu’à la fin. Il a paru en 1863 un ouvrage publié en anglais par l’ordre et avec la sanction de la reine Victoria, sous ce titre : le Prince Albert, son caractère, ses discours, et traduit par madame de W…, avec une préface de M. Guizot, 1 vol. in-8o.

R―LD


SAXE-GOTHA (Ernest, duc de), surnommé le Pieux, était le neuvième des enfants de Jean IV, duc de Saxe-Weimar, landgrave de Thuringe et marquis de Misnie (1)[1]. Il naquit le 25 décembre 1601, au château d’Altenbourg, et resta bientôt sous la tutelle de sa mère et ensuite de son frère ainé, lequel abandonna le soin de son éducation à des instituteurs négligents. Rougissant de ne pas savoir le latin, Ernest recommença ses études élémentaires, apprit les mathématiques et se rendit habile dans la théologie et la philosophie. sans négliger de se perfectionner dans les exercices nécessaires à un jeune prince. Il fit les guerres d’Allemagne, sous Gustave-Adolphe, roi de Suède, et mérita par sa valeur brillante les éloges et l’estime de ce grand capitaine. Après la signature du traité de Prague 1635, il revint dans ses États, où il ne s’occupa plus que du bien-être de ses sujets. Il favorisa les lettres et les sciences et fonda dans chaque paroisse des

SAX

écoles destinées aux enfants des classes pauvres. Il contraignit les parents négligents à faire jouir leurs enfants de l’instruction, encouragea les écrivains à s’occuper de livres élémentaires et fit imprimer à ses frais une édition de la Bible de Luther, appelée de son nom Ernestine, dont il distribua des exemplaires aux églises et aux écoles publiques. Ce prince devint un objet de vénération dans toute la Saxe. Chéri de ses sujets comme un père, il sut par sa sagesse conserver la paix avec ses voisins. Son économie lui permettait de satisfaire sa générosité naturelle sans accroître les charges des peuples, et avec des revenus médiocres il fit des choses d’une utilité incontestable. Ernest mourut le 26 mars 1675, laissant, de son mariage avec la princesse Elisabeth-Sophie d’Altenbourg, sept fils, qui tous ont formé autant de branches, sous les noms de Saxe-Gotha, Cobourg, Meiningen. Romhildt. Eisenberg, Hildburghausen et Saalfeld. Eyring (voy. ce nom) a publié, en latin, la vie, ou plutôt le panégyrique d’Ernest le Pieux. Leipsick. 1704.

W―s.


SAXE-GOTHA (Jean-Guillaume de), petit-fils du précédent et second fils du duc Frédéric, naquit le 4 octobre 1677, fut destiné à la carrière des armes et reçut une éducation brillante, qu’il perfectionna encore par des voyages et par des études approfondies dans tous les genres. Il servit d’abord dans les armées de Hollande et d’Angleterre et fut nommé mestre de camp, puis général-major par le roi Guillaume III. Il passa ensuite dans l’armée impériale avec le même grade et fit plusieurs campagnes en Hongrie, en Pologne, eu Flandre et sur le Rhin, sous le prince de Bade et sous le prince Eugène. Ce dernier en faisait le plus grand cas. « C’était, a-t-il dit, un prince d’une figure charmante. d’une grande valeur et en tout genre accompli. » Il fut tué le 15 août 1707, au siège de Toulon, où il commandait la division prussienne auxiliaire du duc de Savoie. Chargé de couvrir les travaux et attaqué par des forces supérieures, il se défendit avec bravoure et demanda du secours ; mais, ne voulant pas, en l’attendant, abandonner le poste important qui lui était confié, il dit à ses soldats, dont les deux tiers avaient déjà péri : « Mes amis, mourons en gens d’honneur ; » et il tomba au même instant percé de deux coups de feu. Sa troupe périt en se défendant. On porta le corps du jeune prince à Freidenstein, résidence de son père, où il fut inhumé.

M―D j.

SAXE-GOTHA (Ernest II Louis, duc de), petit-neveu du précédent, était le second fils du duc Frédéric III et de la duchesse Louise-Dorothée de Saxe-Meiningen, princesse distinguée par son esprit. Né le 30 janvier 1743, il succéda, en 1772, à son père et sut gouverner avec sagesse son petit Etat, composé des duchés de Gotha et d’Altenbourg. Son premier soin avait été de res-

  1. (1) Ce Jean IV était petit-fils de l’électeur Jean-Frédéric le Magnanime.